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Concurrence et examen de l’investissement étranger au Canada : grandes tendances et questions à suivre en 2016

Auteurs : John Bodrug, Charles Tingley, Jim Dinning, Alysha Manji-Knight et George N. Addy

Dans nos prévisions annuelles de l'année à venir en matière de droit canadien de la concurrence et de l'examen de l'investissement étranger, nous évaluons comment les événements de 2015 influenceront ces domaines du droit en 2016. Cette année, nous suivrons notamment les grandes questions et tendances suivantes :

  • L'impact du nouveau gouvernement fédéral. Bien que les investisseurs étrangers puissent généralement s'attendre au maintien du statu quo sous le nouveau gouvernement libéral, la Loi sur Investissement Canada fera vraisemblablement l'objet de réformes supplémentaires, en particulier pour préciser le critère de l'avantage net. Quant à la législation sur la concurrence proposée par le gouvernement précédent, il reste à voir si le gouvernement libéral ressuscitera la Loi sur la transparence en matière de prix, qui a été vivement critiquée, ou s'il apportera des modifications techniques non controversées afin de clarifier la Loi sur la concurrence.
  • L'importance croissante accordée par le Bureau de la concurrence à l'économie numérique et à d'autres secteurs innovateurs. Selon des commentaires récents du commissaire de la concurrence, les effets de la concurrence sur l'innovation devraient constituer le principal motif de préoccupation de certains secteurs. Des signes de cette orientation se manifestaient déjà vers la fin de 2015 et devraient se multiplier au cours de la nouvelle année.
  • L'importance accordée par le Bureau aux études de marché : des pouvoirs officiels sont‑ils requis ? Le Bureau considère les études de marché comme un outil essentiel pour informer les décideurs au sujet des obstacles inutiles à la concurrence. Des critiques ayant soulevé son absence de compétence pour mener de telles études, le Bureau pourrait chercher à régler la question en demandant des modifications à la Loi sur la concurrence visant à lui conférer les pouvoirs officiels nécessaires.
  • La décision prochaine du Tribunal de la concurrence en matière d'abus de position dominante. La décision du Tribunal de la concurrence dans la poursuite en matière d'abus de position dominante intentée par le commissaire de la concurrence contre le Toronto Real Estate Board, qui devrait être publiée en début d'année, préparera le terrain pour la mise en application de la loi dans ce domaine à l'avenir.
  • La réévaluation possible du processus décisionnel du Bureau de la concurrence. Compte tenu du nombre d'échecs importants qu'il a essuyés ces dernières années, notamment dans deux grandes causes criminelles en 2015, le Bureau pourrait revoir ses processus d'enquête et de prise de décisions dans les affaires fortement médiatisées.
  • Les fusions contestées et les ordonnances de séparation des éléments d'actif. Compte tenu de la décision d'injonction qu'a rendue le Tribunal de la concurrence en mai 2015 dans le cadre de la contestation d'une fusion entre deux importants détaillants d'essence, nous prévoyons que le Bureau intensifiera ses efforts pour obtenir des données économiques des parties aux fusions au cours de ses examens des transactions qu'il envisage de contester. En outre, le Bureau continuera probablement de recourir aux demandes en vertu de l'article 104 de la Loi sur la concurrence comme outil dans le cadre de procédures de fusions contestées à venir.

Le nouveau gouvernement du Canada et la Loi sur Investissement Canada

En octobre dernier, les Canadiens ont élu un gouvernement libéral majoritaire, mettant fin au règne de près d’une décennie du Parti conservateur. De façon générale, nous croyons que les investisseurs étrangers peuvent s’attendre au maintien du statu quo sous le nouveau gouvernement libéral. De fait, ce dernier s’est dit favorable au maintien de l’investissement étranger. Toutefois, il a également insisté sur la transparence du processus décisionnel et indiqué que les investissements par des non-Canadiens devaient se faire d’une manière qui respecte et protège les intérêts du Canada. Dans ce contexte, il se pourrait bien que le gouvernement libéral propose d’apporter des réformes progressives à la Loi sur Investissement Canada (LIC) ou à son mode d’administration au cours de la prochaine année.

Ces réformes pourraient notamment éclairer davantage les investisseurs sur le critère relatif à l’approbation en vertu de la LIC. À l’heure actuelle, en cas de dépassement des seuils applicables aux termes de la LIC, l’investisseur étranger doit démontrer que l’acquisition, projetée par lui, d’une entreprise canadienne sera vraisemblablement à l’« avantage net » du Canada afin d’obtenir l’approbation du ministre permettant que l’opération se réalise. Ce critère de l’« avantage net » a été critiqué parce qu’il constitue une norme imprécise, potentiellement soumise aux caprices du gouvernement. Le nouveau gouvernement a reconnu la nécessité de clarifier le critère de l’avantage net afin que les investisseurs étrangers et les Canadiens sachent avec plus de certitude dans quelles circonstances les investissements seront approuvés en vertu de la LIC. Le premier ministre Trudeau a insisté sur le fait que les investisseurs étrangers avaient besoin de règles plus claires à l’égard des prises de contrôle et que les décisions fondées sur la politique plutôt que sur des critères clairs expliquaient en partie pourquoi, à vrai dire, le Canada voyait les investisseurs mondiaux hésiter à s’engager.

De plus, étant donné le programme politique du gouvernement libéral, sa sensibilité aux intérêts régionaux et à la classe moyenne du Canada, de même que sa détermination à accroître la transparence et la consultation, nous nous attendons à ce que le processus d’examen de l’« avantage net » accorde une importance accrue à l’emploi, au climat, à la croissance économique régionale et à l’innovation. En conséquence, l’approbation relative à l’« avantage net » pourrait nécessiter des engagements plus rigoureux envers le gouvernement dans ces domaines.

Notons également que le Partenariat transpacifique (PTP), s’il était mis en oeuvre augmenterait le seuil relatif à l’examen de l’« avantage net » qui s’applique en vertu de la LIC à la plupart des acquisitions d’entreprises canadiennes par des investisseurs d’États membres du PTP. Ce seuil, qui est fixé actuellement à 600millions de dollars en valeur d’affaire des actifs de l’entreprise canadienne, serait porté à 1,5milliard de dollars. (Des seuils plus bas s’appliquent, et continueront de s’appliquer, aux acquisitions par des entreprises d’État et aux acquisitions d’« entreprises culturelles ».) Toutefois, la mise en oeuvre edu seuil d’examen plus élevé dépend de la ratification du PTP élargi, qui demeure très incertaine et fait l’objet d’un vif débat public.

L’innovation et l’économie numérique

Comme l’économie numérique canadienne continue de se développer, nous prévoyons que le Bureau de la concurrence accordera de plus en plus d’attention à celle-ci et aux autres secteurs innovateurs en 2016 et dans les prochaines années. Le commissaire de la concurrence a mentionné récemment que « l’innovation technologique est le principal moteur de la croissance économique » et que «même si les inefficiences du marché (…) resteront le principal sujet d’enquête du Bureau dans la plupart des secteurs, on pourrait dire que les effets positifs et négatifs sur l’innovation devraient constituer le principal motif de préoccupation dans certains secteurs ». Des signes de cette orientation se manifestent déjà. Vers la fin de 2015, le Bureau de la concurrence a publié un livre blanc exhortant les organismes de réglementation à moderniser la réglementation de l’industrie du taxi pour répondre à l’essor spectaculaire des services numériques de covoiturage, comme Uber. Récemment, le Bureau a également procédé à l’examen de l’accord de radiodiffusion entre Rogers et la Ligue nationale de hockey et a pris des mesures d’application de la loi contre Bell Canada à l’égard de critiques en ligne.

Le nouveau gouvernement accorde lui aussi de l’importance à l’innovation et à l’économie numérique et a reconnu que l’innovation et les nouvelles technologies créeront des emplois et stimuleront la croissance de l’économie canadienne. Ainsi, dans sa lettre de mandat au ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, le premier ministre a énoncé les priorités suivantes en matière d’économie numérique : (i) étendre la couverture des services à large bande haute vitesse et appuyer la concurrence, le choix et la disponibilité de ces services; (ii) favoriser un climat propice aux investissements en ce qui a trait aux services de télécommunications afin que le Canada demeure à la fine pointe de l’économie numérique; et (iii) revoir les mesures visant à assurer la protection des Canadiens et celle des infrastructures critiques du Canada contre les cybermenaces. Le commissaire de la concurrence aura assurément ces initiatives à l’esprit au moment de définir ses priorités pour 2016.

Le Bureau de la concurrence a-t-il besoin de pouvoirs officiels pour mener des études de secteur ?

Le Bureau de la concurrence, sous la gouverne du commissaire actuel John Pecman, a accordé une attention renouvelée aux efforts de promotion, orientation qui devrait se maintenir en 2016. Plus précisément, le Bureau considère les études de secteur ou de marché comme un outil essentiel permettant d’informer les décideurs des obstacles qui freinent inutilement la concurrence et d’élaborer des solutions aux problèmes apparents de compétitivité.

Ces dernières années, le Bureau a publié des études de marché sur les professions autoréglementées (par exemple celles des comptables et des avocats), le secteur des médicaments génériques et les industries de la bière en Ontario et au Québec. Les résultats de ces études variaient, certaines appelant une action gouvernementale directe, d’autres cherchant à persuader différentes parties prenantes de modifier volontairement certaines pratiques. Le Bureau est d’avis que ces études l’ont éclairé sur les moyens de prendre de meilleures décisions en matière d’application de la loi dans les secteurs étudiés.

Cependant, des critiques ont soulevé que le la Loi sur la concurrence ne conférait pas au Bureau le pouvoir de mener de telles études. De plus, même lorsqu’il en entreprend, le Bureau doit se fier à l’information fournie volontairement par les participants du marché. Contrairement au Canada, plusieurs territoires, dont les États-Unis, l’Europe, le Mexique et le Royaume-Uni, confèrent à leurs autorités de réglementation le pouvoir de mener des études et de contraindre les participants du secteur à produire de l’information dans le cadre de celles-ci.

Le Bureau pourrait chercher à régler ces questions en demandant que la Loi sur la concurrence soit modifiée de façon à ce qu’elle lui confère le pouvoir officiel (semblable à ceux dont sont investis les organismes de réglementation d’autres territoires) de mener des études de marché. Bien que le gouvernement n’ait pas abordé la possibilité d’introduire de telles modifications, nous pensons que ces dernières demeureront au centre des priorités du commissaire en 2016. Au minimum, nous prévoyons que le Bureau continuera de mettre l’accent sur les études de marché en employant les outils et les ressources dont il dispose actuellement. De fait, le Bureau a déclaré qu’il entendait mener chaque année au moins deux études de marché dans des secteurs réglementés revêtant une importance particulière pour l’économie canadienne.

L’application du principe de l’abus de position dominante établi par la Cour d’appel fédérale

Dans nos dernières prévisions annuelles, nous avons analysé l’incidence qu’était susceptible d’avoir la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans le cadre du recours pour abus de position dominante intenté par le commissaire de la concurrence contre le Toronto Real Estate Board (TREB). Cette décision semble avoir étendu la portée des dispositions sur l’abus de position dominante de la Loi sur la concurrence à toute conduite ayant un effet sur un marché où l’entité supposément dominante ne participe pas elle-même à la concurrence. Dans cette affaire, le commissaire soutenait que le TREB, association commerciale regroupant la plupart des courtiers et agents immobiliers de la région du Grand Toronto, contrôle le marché des services de courtage d’immeubles résidentiels et qu’il abuse de sa position dominante, même s’il ne participe pas lui-même à la concurrence sur ce marché. Plus précisément, le commissaire alléguait qu’une règle du TREB interdisant à ses membres d’afficher certaines données historiques sur des sites Web de bureau virtuel diminuait sensiblement ou empêchait la concurrence sur le marché des services de courtage d’immeubles résidentiels.

La Cour suprême du Canada a rejeté la demande d’autorisation du TREB d’interjeter appel en juillet 2014, et l’affaire a été renvoyée au Tribunal de la concurrence pour réexamen. (Voir notre analyse de l’affaire après les décisions de la Cour d’appel fédérale et de la Cour suprême.) Le Tribunal a de nouveau instruit l’affaire vers la fin de 2015 et devrait rendre sa décision au début de 2016.

La décision à venir du Tribunal sera importante, puisqu’il s’agira de la première décision à interpréter les dispositions sur l’abus de position dominante à la lumière du jugement de la Cour d’appel fédérale et qu’elle posera les bases de l’application future de la loi dans ce domaine. Les associations commerciales et les sociétés occupant une position dominante auraient tout intérêt à considérer leur conduite à l’aube de cette décision imminente.

Le processus décisionnel du Bureau de la concurrence en 2016 : une réévaluation s’impose-t-elle?

Ces dernières années, le Bureau de la concurrence a essuyé quelques échecs importants, notamment dans deux causes criminelles majeures en 2015.

Fixation des prix du chocolat

En 2007, le Bureau de la concurrence a ouvert une enquête sur des pratiques présumées de fixation des prix par des fabricants canadiens de chocolat et, dans le cadre de cette enquête, a perquisitionné chez certains d’entre eux. Le Bureau avait été mis au courant de cette affaire après que Cadbury, l’un des principaux fabricants de chocolat au Canada, eut communiqué des renseignements sur le présumé complot dans le cadre du Programme d’immunité du Bureau. Après six années d’enquête, des accusations de fixation des prix ont été portées en 2013 contre plusieurs fabricants et certains de leurs cadres, de même que contre un grossiste. Peu après, un fabricant, Hershey, a plaidé coupable et a convenu de payer une amende de 4millions de dollars. Toutefois, avant le début du procès contre les accusés restants, vers la fin de 2015, la Couronne a suspendu les procédures, mettant ainsi fin à l’affaire. Bien que la Couronne n’ait pas fourni les motifs de cette suspension, on peut raisonnablement déduire qu’elle a considéré qu’il n’y avait pas de perspective raisonnable de condamnation.

Truquage des offres se rapportant à des contrats de services en TI

En 2006, le Bureau de la concurrence a ouvert une enquête criminelle sur des pratiques présumées de truquage des offres contre 14 particuliers et sept sociétés relativement à des contrats de services en TI conclus avec le gouvernement fédéral canadien. Cette enquête, tout comme celle sur l’industrie du chocolat, a fait suite à une demande présentée en vertu du Programme d’immunité du Bureau.

Après une enquête de près de 10 ans (ayant permis de recueillir un certain nombre de plaidoyers de culpabilité), un procès de sept mois et l’affectation de ressources considérables (dépassant probablement les 5millions de dollars), les six particuliers et les trois sociétés qui ont choisi d’être jugés par un jury ont été acquittés en avril 2015 des 60 accusations de truquage des offres qui pesaient contre eux. Après les verdicts de non-culpabilité rendus par le jury, le commissaire de la concurrence a déclaré ce qui suit : «Le Bureau et le Service des poursuites pénales du Canada prendront le temps nécessaire pour déterminer quelle suite donner à ces verdicts, notamment pour voir s’il y a lieu d’en appeler. » Finalement, il a été décidé de ne pas interjeter appel.

Étant donné ces échecs retentissants, le Bureau pourrait revoir ses processus d’enquête et de prise de décisions dans ce genre d’affaires fortement médiatisées, y compris ses programmes d’immunité et de clémence, au vu surtout des coûts élevés que de longues enquêtes qui finissent par échouer représentent pour les sociétés et les contribuables. Cependant, malgré l’issue de ces affaires récentes, le commissaire s’est dit convaincu de l’efficacité continue des programmes d’immunité et de clémence du Bureau.

Les fusions contestées et les ordonnances de séparation des éléments d’actif

En avril 2015, le commissaire de la concurrence a intenté un recours contestant la fusion projetée de deux importants détaillants d’essence, Parkland Fuel Corp. et Pioneer Energy, aux termes duquel il a demandé au Tribunal d’interdire l’acquisition (ou d’exiger le dessaisissement postérieurement à la clôture) de stations de vente d’essence au détail et de contrats d’approvisionnement connexes dans 14 marchés locaux (représentant moins de 10% de l’ensemble de la transaction). Le commissaire a également présenté une demande en vertu de l’article 104 de la Loi sur la concurrence afin d’obtenir une injonction interdisant aux parties à la fusion de réaliser celle-ci dans ces 14 marchés jusqu’à l’issue de la contestation. C’était la première fois que le Tribunal de la concurrence était appelé à rendre une injonction qui serait en vigueur pendant toute la durée de l’instruction d’une fusion contestée.

En mai 2015, le Tribunal a prononcé une injonction ordonnant à Parkland et à Pioneer de maintenir les stations de vente d’essence au détail et les contrats d’approvisionnement séparés dans six des 14marchés jusqu’à ce qu’il se soit prononcé sur la contestation du commissaire. Le Tribunal a notamment confirmé que le critère applicable à une injonction provisoire en vertu de l’article 104 était fondé sur la norme applicable aux injonctions par les tribunaux judiciaires. Plus précisément, le commissaire doit (i) démontrer l’existence d’une question sérieuse à juger; (ii) fournir une preuve « claire et non spéculative » qu’un préjudice irréparable sera subi si l’injonction est refusée; et (iii) établir que la prépondérance des inconvénients justifie l’octroi de la mesure de redressement. Le Bureau n’a pas obtenu d’injonctions à l’égard des huit autres marchés parce qu’il n’a pas fourni une preuve « non spéculative » suffisante de préjudice irréparable, à savoir que les consommateurs de ces marchés subiraient des hausses de prix si les stations étaient regroupées. (La contestation n’a pas encore été instruite au fond, et l’audience est prévue pour mai 2016.)

La décision, y compris le critère juridique fixé par le Tribunal, illustre la nécessité, tant pour le Bureau de la concurrence que pour les parties à la fusion, d’élaborer des données économiques suffisantes au cours de la planification de la fusion et d’examiner les questions de concurrence importantes que celle-ci pourrait soulever. Dans le futur, nous prévoyons que le Bureau intensifiera ses efforts pour obtenir de telles données de la part des parties à la fusion pendant l’examen des transactions qu’il envisage de contester. Nous prévoyons en outre que les demandes en vertu de l’article 104 continueront de faire partie de l’arsenal du Bureau dans le cadre de fusions contestées.

La Loi sur la transparence en matière de prix sera-t-elle adoptée sous le nouveau gouvernement ?

Le gouvernement fédéral précédent avait dénoncé ce qu’il considérait comme un écart injustifié entre les prix pratiqués au Canada et ceux pratiqués aux États-Unis pour certains produits, par exemple lorsque des sociétés jouissant d’un pouvoir de marché facturaient des prix plus élevés au Canada qu’aux États-Unis et que ces prix plus élevés ne reflétaient pas des coûts supérieurs « légitimes » liés à l’exercice d’activités au Canada. Le gouvernement précédent avait tenté de résoudre cette préoccupation au moyen du projet de loi C-49, intitulé Loi sur la transparence en matière de prix, qui aurait modifié la Loi sur la concurrence de façon à habiliter le commissaire de la concurrence à enquêter sur la discrimination géographique par les prix et à publier ses conclusions, de manière à faire la lumière sur les écarts injustifiés. Les modifications auraient effectivement conféré au commissaire le pouvoir d’enjoindre à des sociétés de fournir des documents pour justifier leurs prix. Le commissaire n’aurait toutefois pas été habilité à interdire les écarts de prix ou à imposer des sanctions à cet égard.

Le projet de loi C-49 a suscité une vive opposition. Certains craignaient que l’analyse des écarts de prix transfrontaliers exige des enquêtes approfondies difficiles à réaliser, coûteuses et perturbatrices; d’autres soutenaient que le Bureau de la concurrence n’est pas qualifié pour assumer un tel rôle de réglementation et trancher des questions complexes relatives aux écarts de prix.

Quoique le nouveau gouvernement libéral ne se soit pas encore prononcé sur la possibilité de ressusciter la Loi sur la transparence en matière de prix, il est peu probable que la discrimination transfrontalière par les prix figurera parmi ses priorités en 2016, étant donné la faiblesse actuelle du dollar canadien, de même que les coûts et fardeaux importants que pourrait entraîner l’application d’une telle loi.

Modifications techniques relatives à la Loi sur la concurrence

Les accords et les transactions entre « affiliées » sous contrôle commun sont, à juste titre, dispensés de l’application de certaines dispositions de la Loi sur la concurrence, dont celles se rapportant au complot, au maintien des prix et aux préavis de fusion. Il est généralement admis que les accords et les transactions entre entités sous contrôle commun ne devraient pas faire l’objet d’interdictions aux termes de la Loi sur la concurrence, car ces entités ne sont pas censées se faire concurrence. Elles sont plutôt censées coordonner leurs activités le plus efficacement possible.

Cependant, bien que la définition actuelle du terme « affiliée » selon la Loi sur la concurrence vise les personnes morales sous contrôle commun, elle ne s’applique aucunement, par exemple, aux fiducies et ne s’applique pas entièrement aux sociétés de personnes. Quoique les lignes directrices du Bureau de la concurrence énoncent que celui-ci vérifiera si d’autres types d’entités sont sous contrôle commun afin de décider s’il convient d’intenter un recours à l’égard d’un accord, elles ne lient ni le Bureau ni les tribunaux. En outre, ces lignes directrices ne s’appliquent pas lorsqu’il s’agit de déterminer si un avis de fusion est requis aux termes de la Loi sur la concurrence.

Dans le cadre du projet de loi C-49, le précédent gouvernement conservateur proposait d’apporter à la Loi sur la concurrence un certain nombre de modifications techniques utiles, y compris à la définition du terme «affiliée », afin de favoriser un traitement plus uniforme des personnes morales et des autres entités en vertu de la Loi sur la concurrence. Au cours de la prochaine année, nous espérons que le gouvernement libéral apportera ces modifications techniques non controversées afin d’aider à clarifier l’application de la Loi sur la concurrence.

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