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La Cour suprême des États-Unis annule une doctrine vieille de 40 ans, celle de la déférence judiciaire envers les organismes de réglementation

Auteur : Jonathan M. Rhein

Dans un arrêt historique rendu dans l’affaire Loper Bright Enterprises v. Raimondo, Secretary of Commerce publié à la fin de juin, la Cour suprême des États-Unis a annulé la doctrine « Chevron », qui depuis longtemps guidait le contrôle judiciaire de la réglementation fédérale américaine. L’arrêt Chevron, rendu en 1984, avait créé un cadre pour les tribunaux chargés de contrôler la réglementation visant à interpréter les lois adoptées par le Congrès. En bref, selon la doctrine de déférence posée dans l’affaire Chevron, lorsque les lois étaient ambiguës, les tribunaux devaient en règle générale s’en remettre à la lecture qu’en faisaient les organismes de réglementation, tant que leur interprétation était raisonnable.

La Cour suprême a éliminé cette doctrine de déférence (décision peu surprenante au vu des nombreux autres précédents qu’elle a annulés ces dernières années), les tribunaux devant désormais appliquer leurs propres analyse et interprétation, même si celles de l’organisme de réglementation sont raisonnables1.

Moins d’une semaine après avoir cassé l’arrêt Chevron, la Cour suprême a infirmé la décision d’une cour d’appel fédérale et permis à un demandeur de contester un règlement plus de six ans après la prise de celui-ci. La Cour a statué que le délai de prescription de six ans prévu par la loi des États-Unis intitulée Administrative Procedure Act « commence à courir uniquement lorsque le demandeur a un droit d’action complet et actuel ». En d’autres termes, un règlement peut être contesté en tout temps pourvu que la demande soit introduite dans les six ans suivant le préjudice causé par celui-ci.

Les incidences potentielles de ces deux décisions sont multiples, et chambouleront vraisemblablement le droit établi au moyen de politiques publiques. Elles risquent de provoquer une plus forte contestation de la réglementation fédérale américaine, y compris la réglementation fiscale, car les conseillers juridiques (et leurs clients) auront plus souvent de réelles incitations à contester la réglementation (et, dans certains cas, les conseillers juridiques pourraient être tenus du point de vue éthique de soulever l’opportunité d’une telle contestation); elles pourraient aussi avoir un effet sur les affaires en instance. Ainsi, les planificateurs fiscaux qui s’en remettent aux règlements existants devront tenir compte de la possibilité que ceux-ci soient contestés, et prendre en considération les effets que ces contestations pourraient avoir sur les plans fiscaux qu’ils proposent. Nous nous attendons également à ce que les arrêts influencent la manière dont les organismes fédéraux prendront les règlements, accepteront ou rejetteront les commentaires et tenteront d’appliquer la législation existante et future.

Par exemple, les arrêts sont susceptibles d’avoir une incidence sur les changements que décideront d’apporter l’Internal Revenue Service et le Treasury Department au moment de finaliser les règlements sur la taxe d’accise sur le rachat d’actions (pour plus de renseignements, voir notre bulletin). Les contribuables pourraient aussi envisager de contester les règlements finaux qui mettent en œuvre une règle de transparence pour les fonds de placement immobilier sous contrôle américain (pour plus de renseignements sur cette règle, voir notre bulletin).

Les deux arrêts auront sans aucun doute de profondes implications tant dans le contexte fiscal qu’en dehors de celui-ci, y compris à l’égard des règles et des règlements qui ont été pris par la Securities and Exchange Commission et de l’interdiction, promulguée récemment par la Federal Trade Commission, visant la plupart des dispositions de non-concurrence applicables aux employés.

Nous vous communiquerons les dernières informations concernant les faits nouveaux importants et les contestations des règlements fédéraux américains à mesure qu’ils surviennent.

1 Toutefois, la Cour suprême n’a pas cassé un jugement plus ancien encore, soit Skidmore v Swift & Co., arrêt de 1944 portant sur la possibilité pour les tribunaux de s’en remettre aux interprétations des organismes, sans toutefois que ces interprétations déterminent l’issue de l’affaire. Selon l’arrêt Skidmore, les interprétations des organismes, [traduction] « tout en n’étant pas déterminantes pour les tribunaux en raison de l’autorité de ceux-ci, constituent une base d’expérience et de jugements éclairés qui peut guider adéquatement les tribunaux et les justiciables ».

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