Rapport sur la gouvernance 2024 | obligations fiduciaires et limites de l’échange de renseignements

Administrateurs désignés : obligations fiduciaires et limites de l’échange de renseignements Rapport sur la gouvernance 2024 Il n’est pas aisé d’être un administrateur désigné; il a été dit de leurs mandats qu’ils sont susceptibles de n’être [TRADUCTION] « ni agréables ni longs1 » . Bien que la chose soit courante au Canada, la proposition, par un actionnaire, en vertu d’un droit contractuel, d’un candidat à l’élection au poste d’administrateur présente des défis distincts pour la société, l’administrateur désigné et l’actionnaire proposant. D’une part, l’obligation première d’un administrateur d’agir dans l’intérêt de la société n’est nullement amoindrie par le fait qu’il a été désigné par un actionnaire. D’autre part, un actionnaire négocie habituellement un droit de désignation afin de surveiller son investissement et de s’assurer que ses intérêts sont pris en compte par le conseil d’administration. Cette tension entre les obligations fiduciaires et les attentes commerciales commande une gestion proactive de la part de toutes les parties. En effet, comme les tribunaux et les autorités en valeurs mobilières surveillent de plus en plus attentivement les mécanismes des conseils et leurs processus de prise de décision, toutes les parties gagneront à ce que les ententes de désignation soient gérées efficacement. Plus particulièrement, un conseil qui compte un administrateur désigné doit établir des procédures efficaces pour gérer les conflits d’intérêts qui pourraient naître du lien entre l’administrateur et l’actionnaire qui l’a désigné ainsi que pour assurer un échange approprié de renseignements confidentiels entre eux. Auteurs : Jonathan Bilyk et Marc Pontone 1 820099 Ontario Inc. v Harold E. Ballard Ltd., [1991] O.J. No 266 (CJ ON (C div)). 1 Rapport sur la gouvernance 2024

Rapport sur la gouvernance 2024 Administrateurs désignés : obligations fiduciaires et limites de l’échange de renseignements Survol des obligations des administrateurs désignés Le législateur canadien n’établit pas de distinction entre les responsabilités d’un administrateur désigné par un actionnaire et celles d’un administrateur désigné par la direction; un administrateur désigné a envers la société les mêmes obligations que tous les autres membres du conseil. Parmi celles-ci figure l’obligation fiduciaire d’agir dans l’intérêt de la société, ainsi que les responsabilités associées, notamment le devoir de gérer les conflits d’intérêts, de communiquer l’information qui concerne des aspects essentiels des activités commerciales de la société (même s’il s’agit de renseignements confidentiels de l’actionnaire proposant), de ne pas usurper les occasions d’affaires de la société et de préserver la confidentialité de tout renseignement d’entreprise acquis en sa qualité d’administrateur. Les tribunaux canadiens ont statué sans équivoque qu’un administrateur désigné doit en tout temps exercer un jugement indépendant et faire passer les intérêts de l’actionnaire qui l’a désigné après ceux de la société. Évidemment, un administrateur désigné est autorisé à présenter au conseil la perspective de l’actionnaire qui l’a désigné et de tenir compte des intérêts de celui-ci, mais jamais au détriment de ceux des autres parties prenantes. Les tribunaux ont averti les administrateurs désignés qui consultent les actionnaires qui les ont désignés qu’[TRADUCTION] « entre prendre des conseils et recevoir des ordres, la frontière est mince2. » L’administrateur désigné ne doit pas être le porte-voix des préoccupations de l’actionnaire qui l’a désigné. Principaux points à retenir Dans le présent article du Rapport sur la gouvernance, nous examinons les principales considérations fiduciaires que les administrateurs désignés, les actionnaires proposants et les sociétés doivent garder à l’esprit au moment de négocier et de mettre en œuvre une entente de désignation d’administrateur : – U n administrateur désigné est assujetti aux mêmes obligations fiduciaires que les autres membres du conseil. – U n administrateur désigné ne peut transmettre des renseignements confidentiels à l’actionnaire qui l’a désigné que si la société a autorisé, de manière implicite ou explicite, la communication de tels renseignements, et aucun administrateur désigné ne peut limiter, au moyen d’un contrat, son obligation fiduciaire d’agir dans l’intérêt de la société. – U n administrateur désigné doit gérer activement les conflits d’intérêts qui peuvent naître en raison du lien qu’il entretient avec l’actionnaire proposant. – M ême si le conseil d’administration autorise la communication de renseignements, un administrateur désigné doit tenir compte de l’interdiction faite par la législation en valeurs mobilières de communiquer de l’information importante inconnue du public de manière sélective. – U n actionnaire proposant qui utilise de manière inappropriée des renseignements indûment communiqués par un administrateur désigné peut être responsable des manquements de ce dernier. Nous examinons plus avant ces considérations sous la rubrique En pratique qui figure à la fin du présent article. 2 Wood v C.F.N. Precision Inc., 2008 CanLii 19797 (SC ON) 2 Davies | dwpv.com

Conflits d’intérêts Comme tout membre du conseil, un administrateur désigné doit gérer les conflits d’intérêts qui nuiraient à l’indépendance de son jugement en tant que fiduciaire. La nature du lien entre un administrateur désigné et l’actionnaire qui l’a désigné peut être source de conflits avec les obligations de l’administrateur désigné envers la société. SOURCES DE CONFLITS La détermination de l’indépendance d’un membre du conseil appelle une analyse factuelle et, dans le cas d’un administrateur désigné, nécessite un examen attentif du lien entre l’administrateur et le proposant. Cela dit, le fait qu’un administrateur ait été désigné par un actionnaire ne compromet pas comme tel l’indépendance de l’administrateur désigné. Certaines sources de conflits peuvent être évidentes. Par exemple, si l’administrateur désigné est également un fiduciaire de l’actionnaire proposant, l’administrateur sera confronté aux défis posés par son double statut de fiduciaire, ses obligations envers un bénéficiaire (l’obligation de confidentialité, p. ex.) pouvant alors entrer en conflit avec ses obligations envers l’autre (l’obligation de communiquer de l’information, p. ex.). Cette situation n’est pas rare dans le cas des sociétés de capital-investissement ou de capital-risque, lorsqu’un haut dirigeant d’un fonds est nommé au conseil d’une société dans laquelle le fonds investit. S’il y a conflit entre les intérêts de l’actionnaire et ceux de la société dans laquelle le fonds investit et que le conflit ne peut être réglé au moyen notamment d’un mécanisme de retrait, les doubles obligations de l’administrateur désigné peuvent devenir inconciliables et obliger celui-ci à démissionner. Il arrive par ailleurs que la source de conflits découlant du lien entre l’administrateur désigné et l’actionnaire proposant ne soit pas aussi directe. Par exemple, dans l’affaire Goldstein v Denner, la Cour de la chancellerie (Court of Chancery) du Delaware a remis en question l’indépendance d’un membre du conseil hypothétique désigné par un proposant « récurrent », comme un actionnaire activiste, qui a pour stratégie d’entretenir des liens symbiotiques avec des candidats à un poste d’administrateur et, en échange du mandat éventuel de ceux-ci, de tacitement obtenir leur collaboration pour promouvoir ses intérêts3. GESTION DES CONFLITS La société et l’administrateur désigné doivent tous deux repérer et gérer activement les conflits auxquels l’administrateur pourrait faire face. Même en l’absence de changements dans le lien entre l’actionnaire proposant et l’administrateur désigné, l’obligation d’évaluer l’indépendance est continue et ne doit pas se limiter à une analyse ponctuelle de la situation au début du mandat de l’administrateur. Bien que les conflits doivent être repérés et gérés dans le cours normal des activités, la surveillance est primordiale dans le cas des opérations dans lesquelles l’actionnaire proposant pourrait avoir un intérêt différent de ceux des autres actionnaires. Si une opération conflictuelle de cette nature se concrétise, la société et l’administrateur désigné doivent confirmer (i) que l’administrateur désigné demeure indépendant de l’actionnaire proposant, et (ii) si l’administrateur désigné n’est pas indépendant, la façon dont les parties peuvent gérer efficacement le conflit. Les conflits découlant d’opérations structurelles peuvent survenir de manière flagrante ou plus subtile. Des décisions récentes de la Cour de la chancellerie du 3 Goldstein v Denner, Del Ch, 26 mai 2022. 3 Rapport sur la gouvernance 2024

Rapport sur la gouvernance 2024 Administrateurs désignés : obligations fiduciaires et limites de l’échange de renseignements Delaware donnent des exemples instructifs de l’écart qui peut exister entre les intérêts d’une société et ceux d’un actionnaire proposant. Même si les obligations d’un administrateur désigné sont depuis un certain temps bien définies dans la jurisprudence canadienne, la jurisprudence du Delaware présente une application actualisée des principes liés aux obligations fiduciaires dans le contexte d’opérations commerciales complexes. Les conflits qui ont été portés en justice incluent des situations dans lesquelles l’actionnaire proposant a favorisé une opération particulière parce qu’il avait besoin de liquidités (un besoin imminent de récupérer un investissement important, p. ex.) ou qu’il avait besoin de cristalliser un gain à un moment précis (pour éviter d’être visé par une modification défavorable des règles fiscales, p. ex.), ou parce que l’opération priorisait plus particulièrement un rendement sur son investissement dans la société (comme des actions privilégiées ou des titres de créance)4. Compte tenu de la jurisprudence canadienne concernant les obligations des administrateurs désignés, il est raisonnable de penser que de tels litiges pourraient survenir au Canada. Dans l’affaire Manti Holdings, LLC v The Carlyle Group Inc., la Cour de la chancellerie du Delaware a rejeté une requête visant à faire rejeter une action selon laquelle des administrateurs désignés ont manqué à leurs obligations fiduciaires en favorisant la vente prématurée de l’entreprise au profit de l’actionnaire qui les avait désignés, une société de capital-investissement dont le fonds d’investissement avait acheté une participation dans l’entreprise. Cette participation était l’un des investissements restants du fonds, que la société de capital-investissement se proposait de dissoudre incessamment. Les administrateurs désignés promouvaient activement la vente à un moment où il n’était pas certain que l’entreprise allait pouvoir renouveler des contrats clés avec des clients, et le prix de vente reflétait cette incertitude. Les contrats ont en fin de compte été renouvelés avant la conclusion de l’opération, mais le prix de vente n’a pas été ajusté pour tenir compte du changement. Malgré les protestations d’un autre membre du conseil qui souhaitait que l’entreprise sonde à nouveau le marché, les administrateurs désignés auraient pressé la société de réaliser la vente au prix initial, afin de mettre fin au fonds d’investissement5. L’affaire Manti Holdings, comme d’autres décisions récentes de la Cour de la chancellerie, est le signe de la vigilance accrue des actionnaires et des tribunaux face au rôle des administrateurs désignés dans les processus de vente. Bien que la Cour s’en soit tenue à analyser les faits relatifs à la requête dont elle avait été saisie et qu’aucune conclusion judiciaire n’ait été émise au sujet du comportement des administrateurs désignés, l’affaire Manti Holdings sert de mise en garde : le conseil doit s’assurer que le processus de vente n’est pas vicié par la participation ou l’influence d’administrateurs qui se trouvent en situation de conflit d’intérêts, et l’administrateur désigné doit se demander si sa participation à l’opération est opportune compte tenu du conflit d’intérêts qui pourrait découler de son lien (fiduciaire ou autre) avec l’actionnaire qui l’a désigné. Échange de renseignements entre les administrateurs désignés et les actionnaires proposants DROIT DES ADMINISTRATEURS À L’ACCÈS AUX RENSEIGNEMENTS Compte tenu de leur obligation de surveillance de la société, les administrateurs bénéficient d’un accès 4 Voir Goldstein; Manti Holdings, LLC v The Carlyle Group Inc., Del Ch, 3 juin 2022; Firefighters' Pension System of The City of Kansas City, Missouri Trust v Foundation Building Materials, Inc., Del Ch, 31 mai 2024. 5 Manti Holdings. 4 Davies | dwpv.com

illimité aux livres et registres de la société, sous réserve de certaines exceptions limitées. Le fait qu’un administrateur ait été désigné par un actionnaire ne modifie pas, en soi, le droit de l’administrateur à l’accès aux renseignements. Dans un article d’un numéro précédent du Rapport sur la gouvernance, nous abordons les rares circonstances dans lesquelles l’accès d’un administrateur aux renseignements peut être restreint, notamment lorsque les documents concernent une question à l’égard de laquelle l’administrateur est en conflit. CONFIDENTIALITÉ ET ÉCHANGE DE RENSEIGNEMENTS Les obligations fiduciaires d’un administrateur comprennent l’obligation de préserver la confidentialité des renseignements sur la société reçus dans le cadre de son mandat d’administrateur. Cette obligation figure souvent dans le code de conduite de la société ou dans une entente conclue entre la société et l’administrateur qui traite des obligations de celui-ci en matière de confidentialité. Cette obligation plutôt simple peut toutefois agacer l’actionnaire proposant pour qui l’accès aux renseignements est l’un des principaux motifs de l’obtention du droit de désignation. De son côté également, la société peut considérer l’entente de désignation comme un moyen par lequel elle peut, par l’intermédiaire de l’administrateur désigné, obtenir et utiliser l’expertise de l’actionnaire proposant et évaluer le degré d’adhésion d’une partie prenante principale aux décisions importantes. Ainsi, un certain échange de renseignements entre l’actionnaire proposant et l’administrateur désigné est souvent souhaitable et autorisé dans les faits. 5 Rapport sur la gouvernance 2024

Rapport sur la gouvernance 2024 Administrateurs désignés : obligations fiduciaires et limites de l’échange de renseignements Conformément aux pratiques exemplaires, tout échange de renseignements inconnus du public doit se faire avec le consentement de la société. Si les parties ont l’intention d’autoriser la communication de renseignements entre l’administrateur désigné et l’actionnaire proposant, elles devraient envisager de convenir expressément de modalités qui permettent la communication appropriée de ceux-ci. Cependant, même si l’échange de renseignements est prévu par une entente officielle, il ne peut jamais faire l’objet d’une autorisation absolue ou inconditionnelle. Comme nous l’expliquons ci-après, l’échange de renseignements confidentiels doit être effectué conformément à la fois à l’obligation fiduciaire de l’administrateur désigné d’agir dans l’intérêt de la société, au besoin de protéger le privilège de la société à l’égard de certaines communications et aux restrictions imposées par la législation en valeurs mobilières concernant la divulgation de renseignements importants inconnus du public. Il importe de noter que le droit des sociétés du Canada et du Delaware diffère à des égards importants en ce qui concerne l’échange de renseignements. Contrairement à la règle canadienne applicable par défaut interdisant l’échange de renseignements, les tribunaux du Delaware ont reconnu que certains liens entre l’administrateur désigné et l’actionnaire proposant donnent à l’administrateur désigné le droit de communiquer des renseignements à l’actionnaire proposant (y compris lorsque l’administrateur désigné agit à titre de fiduciaire à la fois de la société et de l’actionnaire proposant). Mais, même dans ce cas, la Cour de la chancellerie a émis la mise en garde suivante : les administrateurs désignés [TRADUCTION] « utilisent et échangent les renseignements à leurs propres risques, et peuvent être tenus responsables d’un manquement à leur obligation fiduciaire s’ils utilisent les renseignements ou permettent qu’ils soient utilisés à des fins inappropriées6 » . ENTENTE RELATIVE AU DROIT D’ÉCHANGER DES RENSEIGNEMENTS En règle générale, les parties ont intérêt à consigner le consentement de la société à l’échange de renseignements dans une entente qui énonce les modalités selon lesquelles l’administrateur désigné peut transmettre des documents confidentiels à l’actionnaire proposant. L’administrateur désigné et l’actionnaire proposant voudront s’assurer que la communication de renseignements sur la société est effectuée avec le consentement clair de la société. La société, elle aussi, voudra s’assurer que tout échange de renseignements est effectué de manière appropriée et dans son intérêt. Bien que les parties puissent invoquer un consentement implicite dans certaines circonstances, une entente écrite se révèle généralement la meilleure option. Les ententes d’échange de renseignements conclues avec un actionnaire proposant visent habituellement à encadrer les types de renseignements qu’un administrateur désigné peut communiquer à l’actionnaire proposant et les modes de communication autorisés. Les détails de telles ententes sont propres à chaque situation et font l’objet d’intenses négociations, mais ils portent souvent sur une ou plusieurs des questions suivantes : (i) l’obligation de l’actionnaire proposant de traiter les renseignements de manière confidentielle; (ii) la question de savoir si l’administrateur désigné est responsable de l’utilisation inappropriée des renseignements par l’actionnaire proposant; (iii) les restrictions applicables à l’utilisation des renseignements par l’actionnaire proposant; (iv) les restrictions relatives aux représentants de l’actionnaire proposant qui ont accès aux renseignements; (v) les restrictions concernant l’échange de renseignements portant sur des questions qui sont source de conflits d’intérêts; et (vi) les limites applicables à l’échange de documents privilégiés. 7 Kraft (Re), 2023 ONCMT 36. 6 Hyde Park Venture Partners Fund III, L.P., v FairXchange, LLC, Del Ch, 9 mars 2023. Voir également Icahn Partners LP v Francis deSouza, Del Ch, 16 janvier 2024. 6 Davies | dwpv.com

LIMITES APPLICABLES À L’ÉCHANGE DE RENSEIGNEMENTS : LES OBLIGATIONS FIDUCIAIRES Quelles que soient les modalités de toute entente contractuelle relative à l’échange de renseignements conclue entre les parties, un administrateur désigné peut être tenu responsable des manquements à ses obligations fiduciaires s’il communique des renseignements à des fins autres que l’intérêt de la société. Par conséquent, l’administrateur désigné doit examiner l’objectif de la communication dans chaque cas, pour s’assurer qu’il respecte non seulement les modalités de toute entente contractuelle relative à l’échange de renseignements, mais également ses obligations envers la société. LIMITES APPLICABLES À L’ÉCHANGE DE RENSEIGNEMENTS : COMMUNICATION SÉLECTIVE D’INFORMATION ET OPÉRATIONS D’INITIÉS Dans le cas d’une société ouverte, la communication par l’administrateur désigné de renseignements confidentiels à l’actionnaire proposant soulève des préoccupations concernant la communication sélective d’information (communication de renseignements privilégiés). Selon la législation en valeurs mobilières, il est interdit à l’administrateur d’une société ouverte de communiquer des renseignements importants de la société inconnus du public à toute personne, à moins que cette communication ne soit « nécessaire dans le cours des activités » (« NCA »). Il ne faut pas croire qu’il est simple de déterminer si une communication donnée est NCA. Le Tribunal des marchés financiers de l’Ontario (le « Tribunal ») a déclaré que le mot « nécessaire » dans l’exception en question place les critères applicables à la communication sélective d’information au-delà du simple objectif commercial ou de la simple justification commerciale, et a précisé que la communication doit être « essentielle », « indispensable » ou « requise » eu égard aux activités. Fait intéressant, le Tribunal a également souligné que la conclusion qu’il a tirée ne doit pas être interprétée, jusqu’à présent, comme signifiant que [TRADUCTION] « dans toutes les situations de fait, l’exception relative à ce qui est NCA se limite à la prise en compte de ce qui est nécessaire dans le cours des activités de l’émetteur » (c’est nous qui soulignons). Ce faisant, le 7 Rapport sur la gouvernance 2024

Rapport sur la gouvernance 2024 Administrateurs désignés : obligations fiduciaires et limites de l’échange de renseignements Tribunal a laissé la porte ouverte à la conclusion selon laquelle la communication sélective d’information pouvait être justifiée dès lors qu’elle est nécessaire dans le cours des activités de l’informateur (par exemple, les activités de l’administrateur désigné) bien que la prudence soit de mise jusqu’à ce que les limites de cette ouverture aient été éprouvées dans d’autres décisions. Pour de plus amples renseignements, voir notre analyse plus détaillée de l’exception relative à l’interdiction de la communication sélective d’information (lien). En tant que personne qui reçoit des renseignements confidentiels, l’actionnaire proposant peut obtenir des renseignements importants sur la société qui sont inconnus du public; il lui est donc interdit d’effectuer des opérations sur les titres de la société en question sur le fondement de ces renseignements, sous réserve d’exceptions limitées. En pratique — Un administrateur désigné est assujetti aux mêmes obligations fiduciaires que les autres membres du conseil. Le fait qu’un administrateur ait été désigné par un actionnaire ne modifie pas ni n’allège par ailleurs les obligations de l’administrateur envers la société. L’administrateur désigné doit agir dans l’intérêt de la société et subordonner les intérêts de l’actionnaire proposant à ceux de la société. Les exigences strictes liées aux fonctions des administrateurs désignés peuvent surprendre à la fois ceux-ci et les actionnaires proposants, qui peuvent s’attendre à ce qu’un administrateur désigné représente et défende les intérêts de l’actionnaire. La formation des administrateurs est essentielle à une bonne gouvernance, à commencer par des séances d’intégration et des documents qui énoncent clairement les responsabilités de l’administrateur désigné. 8 Davies | dwpv.com

— Un administrateur désigné ne peut transmettre des renseignements confidentiels à l’actionnaire qui l’a désigné que si la société a autorisé, de manière implicite ou explicite, la communication de tels renseignements. Aucun administrateur ne peut limiter, au moyen d’un contrat, son obligation fiduciaire d’agir dans l’intérêt de la société. L’administrateur désigné doit préserver le caractère confidentiel des renseignements concernant la société portés à sa connaissance en sa qualité d’administrateur. Sans le consentement (implicite ou explicite) de la société, il est interdit à l’administrateur désigné de communiquer des renseignements confidentiels à l’actionnaire proposant. Souvent, les parties acceptent un droit de désignation en raison des avantages qui découlent de la conclusion d’une entente d’échange de renseignements. La société peut souhaiter que l’administrateur désigné et l’actionnaire proposant tiennent des discussions utiles qui lui permettront de tirer parti de l’expertise de l’actionnaire, et, de son côté, l’actionnaire peut voir ces discussions comme un moyen lui permettant de surveiller son investissement et d’exercer une influence sur celui-ci. Conformément aux pratiques exemplaires, les parties qui souhaitent permettre à l’administrateur désigné d’échanger des renseignements confidentiels avec l’actionnaire proposant ont intérêt à conclure une entente écrite qui énonce les modalités encadrant la communication de ces renseignements. Même lorsque la société convient d’une entente d’échange de renseignements, l’administrateur désigné est assujetti à l’obligation primordiale de s’assurer que les renseignements sont communiqués uniquement dans l’intérêt de la société et non à des fins illégitimes. — Un administrateur désigné doit gérer activement les conflits d’intérêts qui peuvent naître en raison du lien qu’il entretient avec l’actionnaire proposant. Les obligations fiduciaires de l’administrateur désigné comprennent l’obligation d’éviter les situations de conflit d’intérêts avec la société. La question de savoir si un administrateur doit participer aux délibérations ou voter à l’égard d’une question donnée concernant la société dépend, entre autres, du degré d’indépendance de l’administrateur, c’est-à-dire s’il est en situation de conflit d’intérêts dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’elle nuise à l’exercice de son jugement indépendant en tant que fiduciaire. La société et l’administrateur désigné doivent examiner si le lien entre l’administrateur désigné et l’actionnaire proposant peut entraîner un conflit réel ou perçu. Lorsque les intérêts de l’actionnaire proposant à l’égard d’une opération diffèrent de ceux des autres actionnaires, le conseil devrait envisager la prise de mesures appropriées pour s’assurer que tout administrateur désigné en situation de conflit ne participe pas aux négociations relatives à l’opération ni n’exerce par ailleurs une influence sur celles-ci. Un comité du conseil actif et indépendant est un outil essentiel à la gestion de tels conflits dans le cadre de la gouvernance liée aux opérations. 9 Rapport sur la gouvernance 2024

Rapport sur la gouvernance 2024 Administrateurs désignés : obligations fiduciaires et limites de l’échange de renseignements — Même si le conseil d’administration autorise la communication de renseignements, un administrateur désigné doit tenir compte de l’interdiction faite par la législation en valeurs mobilières de communiquer de manière sélective de l’information importante inconnue du public. Dans le cas d’une société ouverte, la société et l’administrateur désigné doivent tous deux s’assurer que la communication de renseignements importants inconnus du public à l’actionnaire proposant est effectuée conformément aux règles relatives à l’interdiction de communication sélective d’information, y compris l’exigence selon laquelle la communication ne doit avoir lieu que si elle est « nécessaire dans le cours des activités ». — Un actionnaire proposant qui utilise de manière inappropriée des renseignements indûment communiqués par un administrateur désigné peut être responsable des manquements de ce dernier. Les actionnaires proposants pourraient engager leur responsabilité pour délit d’initié en cas d’utilisation inappropriée de renseignements importants inconnus du public. Ils devraient aussi se garder d’accepter ou d’encourager le manquement, par un administrateur désigné, à ses obligations fiduciaires, et de sciemment tirer profit d’un tel manquement. Bien que nous n’abordions pas cette question en détail dans les présentes, un actionnaire proposant qui, sciemment, utilise de manière inappropriée des renseignements confidentiels obtenus à la suite d’un manquement de l’administrateur désigné à une obligation fiduciaire pourrait fournir un certain nombre de motifs susceptibles d’engager sa responsabilité, notamment pour assistance en connaissance de cause au manquement à une obligation fiduciaire. 10 Davies | dwpv.com

Personnes-ressources Si vous souhaitez discuter de questions abordées dans le présent rapport ou si vous désirez un complément d’information, veuillez communiquer avec l’une des personnes suivantes ou visiter notre site Web au www.dwpv.com. Patricia L. Olasker 416.863.5551 polasker@dwpv.com Aaron J. Atkinson 416.367.6907 aatkinson@dwpv.com Brett Seifred 416.863.5531 bseifred@dwpv.com Toronto Franziska Ruf 514.841.6480 fruf@dwpv.com Montréal Jeffrey Nadler 212.588.5505 jnadler@dwpv.com New York La rédaction du présent rapport et les recherches préalables sont un projet de Davies Ward Phillips & Vineberg S.E.N.C.R.L., s.r.l., et non des travaux exécutés pour un client ou tout autre tiers. On ne doit pas considérer l’information contenue dans le présent rapport comme un conseil juridique. 11 Rapport sur la gouvernance 2024

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