Bulletin

Législation fiscale américaine : Rétrospective des faits saillants de 2019 et perspectives pour 2020

Auteurs : Peter Glicklich, Gregg M. Benson et Heath Martin

Faits nouveaux en fiscalité américaine en 2019

En 2019, aux États-Unis, les autorités fiscales ont continué de se préoccuper principalement de l’élaboration de lignes directrices en application de la monumentale loi Tax Cuts and Jobs Act (la « loi TCJA »), promulguée à la fin de 2017. D’importants projets de règlements ont été présentés dès 2018, dont un vaste ensemble de règles sur le nouveau régime d’imposition applicable au revenu mondial à faible taux d’imposition tiré de biens incorporels (global intangible low-taxed income) (le « revenu GILTI »), de nouvelles règles de lutte contre le dépouillement des gains, énoncées à l’article 163(j)1, et des règles sur le nouvel impôt minimum anti-abus contre l’érosion de la base d’imposition (base erosion and anti-abuse tax) (l’« impôt BEAT ») et les dispositifs hybrides. Les travaux réglementaires se sont poursuivis en 2019, l’Internal Revenue Service (« IRS ») ayant publié la version définitive de nombreux règlements qui avaient été proposés en 2019 ainsi que plusieurs autres projets de règlements.

Même après deux ans d’activité frénétique, l’IRS n’a pas encore publié plusieurs ensembles de règlements importants en application de la loi TCJA. L’IRS a déclaré que l’un de ses principaux objectifs pour 2020 était d’achever l’élaboration des lignes directrices relatives à la loi TCJA. Les fiscalistes américains s’attendent donc à voir des progrès considérables dans ce dossier tout au long de l’année 2020.

À l’échelle internationale, en 2019, certains pays, frustrés par la lenteur de la progression des efforts de l’Organisation de coopération et de développement économiques (« OCDE ») pour lutter contre l’évasion fiscale internationale, ont pris, à l’égard de l’érosion de la base d’imposition, des mesures unilatérales visant les grandes sociétés telles que Google et Amazon. La France, en particulier, s’est fait remarquer en adoptant une « taxe sur les services numériques » s’appliquant au chiffre d’affaires tiré par les entreprises de la fourniture de certains services numériques aux consommateurs français. Les États-Unis considèrent que cette nouvelle taxe prend pour cible les entreprises américaines et ont proposé de riposter en imposant des tarifs douaniers aux produits français.

Un bref examen des faits nouveaux en fiscalité en 2019 précède les perspectives pour 2020.

Législation fiscale fédérale

Aucune loi fiscale fédérale importante n’a été adoptée en 2019, même si l’ensemble des fiscalistes reconnaissent la nécessité d’un projet de loi apportant des corrections techniques à la loi TCJA en raison de problèmes de formulation de celle-ci.

Mesures administratives prises au niveau fédéral

L’IRS et le département du Trésor ont continué, en 2019, de mettre au point des lignes directrices concernant divers éléments de la loi TCJA.

1. Version définitive de règlements d’application de la loi TCJA

L’IRS a réussi à établir la version définitive de plusieurs projets de règlements importants. La plupart des règlements définitifs ne comportent que des changements mineurs par rapport aux projets de règlements. Les règlements adoptés en 2019 en application de la loi TCJA portent, notamment, sur le revenu GILTI, l’article 199A et l’impôt BEAT.

2. Projets de règlements supplémentaires en application de la loi TCJA

De plus, l’IRS a publié plusieurs nouveaux projets de règlements, dont certains favoriseraient les contribuables, y compris ceux que nous décrivons ci-dessous.

Retenue applicable à la cession d’une participation dans une société de personnes générant un revenu ECI. Avant l’adoption de la loi TCJA, la législation fiscale fédérale américaine ne précisait pas clairement si la cession par une personne étrangère d’une participation dans une société de personnes (ou une autre entité classée comme société de personnes aux fins de la législation fiscale fédérale américaine) générant un revenu directement rattaché (en partie ou en totalité) à une entreprise ou à un commerce aux États-Unis (effectively connected income) (un « revenu ECI ») était imposable. La question a été élucidée dans la loi TCJA, et l’on sait maintenant que le gain réalisé sur une telle cession est traité comme un revenu ECI et que le cessionnaire d’une participation dans une société de personnes générant un revenu ECI se voit imposer une retenue fiscale correspondant à 10 % du prix d’achat de la participation. Cette règle est connue sous le nom de 1446(f) withholding (la « retenue selon l’article 1446(f) »).

En 2018, l’IRS a publié deux avis contenant des lignes directrices temporaires concernant la nouvelle retenue fiscale. En 2019, il a publié un projet de règlement reprenant en partie ces avis, mais y apportant des modifications significatives. Les avis prévoyaient, par exemple, certaines exceptions à la retenue selon l’article 1446(f) si le revenu ECI tiré de la vente hypothétique des actifs de la société de personnes représentait moins de 25 % du gain total ou si moins de 25 % de la part du revenu de la société de personnes ayant été attribuée à l’associé cédant étaient considérés comme un revenu ECI. Le projet de règlement a ramené de 25 % à 10 % le seuil fixé pour ces exceptions.

D’autres dispositions de ces projets de règlements prévoient une exception à la retenue selon l’article 1446(f) à l’intention des contribuables bénéficiant d’avantages accordés par des conventions fiscales et décrivent la procédure que doivent suivre les contribuables pour avoir droit à l’exception à la retenue selon l’article 1446(f).

Revenu GILTI. La loi TCJA prévoit un nouveau régime pour le revenu GILTI, selon lequel le contribuable doit constater certains revenus d’une société étrangère contrôlée (controlled foreign corporation) (une « société CFC ») qui excèdent un certain taux de rendement tiré des actifs étrangers de la société CFC, même si ces revenus ne lui ont pas été distribués. En plus de publier le règlement définitif sur le revenu GILTI, faisant suite à son projet de règlement de 2018, l’IRS a publié, en 2019, un nouveau projet de règlement concernant le revenu GILTI. Ce nouveau projet de règlement prévoit une exception relative aux taux d’imposition élevés pour les revenus qui seraient autrement considérés comme des revenus GILTI. Selon cette nouvelle exception relative aux taux d’imposition élevés, un actionnaire de contrôle des États-Unis d’une société CFC peut choisir d’exclure le revenu GILTI de son revenu brut si le revenu GILTI est assujetti à un impôt sur le revenu étranger à un taux supérieur à 90 % du taux d’imposition du revenu des sociétés des États-Unis. De plus, le projet de règlement publié en 2019 précise que le particulier qui choisit d’être imposé en tant que société par actions aux fins des règles relatives aux sociétés CFC peut se prévaloir de la déduction pour revenu GILTI et qu’une approche globale est employée pour déterminer si l’associé d’une société de personnes américaine est un « actionnaire des États-Unis » (United States shareholder) aux fins générales des règles s’appliquant au revenu assujetti à la sous-partie F (subpart F income) (c’est-à-dire qu’en général, selon cette approche, seul l’associé des États-Unis détenant une participation indirecte d’au moins 10 % dans une société CFC doit inclure dans son revenu courant le revenu assujetti à la sous-partie F de la société CFC).

Revenu FDII. Selon la loi TCJA, une société des États-Unis est en droit de déduire une partie de son revenu tiré de la vente de biens ou de services à un acheteur étranger qui utilise ceux-ci à l’extérieur des États-Unis (foreign-derived intangible income) (le « revenu FDII »). L’IRS a publié un projet de règlement concernant la déduction, conformément à l’article 250, du revenu FDII, qui précise avant tout le mode de calcul de la déduction. Les règles concernant le revenu FDII permettent aux contribuables américains qui sont des sociétés de bénéficier d’un taux d’imposition réduit pour les revenus tirés de ventes de biens ou de services à des acheteurs étrangers.

Article 199A. La loi TCJA a créé une nouvelle déduction, selon l’article 199A du Code, pour certains revenus admissibles d’entreprise (qualified business income) réalisés par l’entremise d’une entité intermédiaire ou réalisés par une entreprise individuelle. En plus de publier la version définitive d’un projet de règlement concernant l’article 199A, l’IRS a produit un nouveau projet de règlement et un avis concernant l’article 199A qui précisent le traitement favorable accordé à certaines sociétés d’exploitation immobilières. Le projet de règlement comprend des dispositions sur le traitement des pertes suspendues, de certains dividendes provenant d’une société d’investissement réglementée et de sommes reçues de fiducies à intérêt fractionné (split-interest trusts) et de fiducies résiduaires de bienfaisance (charitable remainder trusts). L’IRS ne s’est pas prononcé sur le traitement, selon l’article 199A, des sociétés de personnes cotées en bourse et a demandé des commentaires à ce sujet.

Zones d’opportunité reconnues. L’IRS a publié un projet de règlement sur le régime s’appliquant aux zones d’opportunité reconnues (qualified opportunity zones). Selon ce projet de règlement, un fonds d’opportunité reconnu (qualified opportunity fund) peut tirer des avantages fiscaux de ses actifs individuellement et peut détenir des liquidités comme fonds de roulement tout en continuant de satisfaire au critère des actifs applicables. De plus, le projet de règlement prévoit plusieurs règles refuges destinées à éviter que des activités commerciales ordinaires n’enfreignent la réglementation relative aux zones d’opportunité reconnues.

L’impôt BEAT. L’impôt BEAT (base erosion and anti-abuse tax) est essentiellement un nouvel impôt minimum imposé aux grandes sociétés qui, en versant des paiements déductibles ou amortissables à des sociétés étrangères de leur groupe, réduisent leurs revenus imposables aux États-Unis. En plus d’adopter sous forme définitive un projet de règlement antérieur, l’IRS a publié un nouveau projet de règlement relatif à l’impôt BEAT.

Selon celui-ci, le contribuable peut choisir de renoncer à des déductions fiscales afin de diminuer ses paiements entraînant l’érosion de la base d’imposition, évitant ainsi éventuellement d’avoir à payer l’impôt BEAT pour une année donnée. Le contribuable doit effectuer ce choix tous les ans. Étant donné que le pourcentage d’érosion de la base d’imposition est calculé pour l’ensemble d’un groupe, il pourrait être nécessaire pour les sociétés du groupe du contribuable de renoncer aux déductions si le contribuable a l’intention de réduire ainsi son pourcentage d’érosion de la base d’imposition.

Déduction pour dividendes de source étrangère. L’IRS a publié un règlement temporaire concernant le calcul de la déduction s’appliquant à la partie réputée de source étrangère des dividendes tirés de sociétés étrangères détenues à 10 %. Ce règlement limite la déduction applicable à certaines « opérations extraordinaires » (extraordinary transactions).

Vente à l’étranger de stocks produits aux États-Unis. L’IRS a publié un projet de règlement se rapportant aux règles d’application de l’article 863, modifiées par la loi TCJA, qui servent à déterminer la source des revenus tirés de la vente de stocks et de certains autres biens personnels. Selon ces règles, les revenus provenant de la vente de biens produits entièrement aux États-Unis, mais vendus à l’extérieur des États-Unis sont considérés comme provenant entièrement des États-Unis. Si le vendeur de ces biens est une personne des États-Unis (U.S. person), il ne pourra bénéficier d’aucun crédit pour impôt étranger car, selon le Code, un crédit pour impôt étranger ne peut s’appliquer qu’aux revenus de source étrangère. Il est possible qu’une convention fiscale passe outre à ces règles et accorde au vendeur un crédit pour impôt étranger. Par contre, le projet de règlement confirme que si une personne étrangère produit des biens à l’étranger et les vend aux États-Unis, une partie du bénéfice de la vente sera considérée comme provenant des États-Unis selon l’article 865.

Reconnaissance en tant que société CFC. La loi TCJA a éliminé une disposition selon laquelle l’attribution à la baisse (downward attribution) de la propriété d’actions à des personnes des États-Unis n’était pas prise en compte afin de déterminer si une société était considérée comme une société CFC. L’élimination de cette disposition a été vastement critiquée par les fiscalistes, qui ont affirmé qu’elle avait des conséquences que le Congrès n’avait pas prévues, invoquant à l’appui de leur affirmation l’historique des dispositions régissant l’attribution de la propriété d’actions pour ce qui est des sociétés CFC. L’IRS a publié un projet de règlement et un projet de procédure relativement aux revenus qui réduisent certains effets de l’attribution à la baisse. De plus, l’IRS a proposé une correction technique qui rétablirait la disposition faisant en sorte que l’attribution à la baisse ne soit pas prise en compte, sauf dans les cas où une personne détiendrait directement ou indirectement plus de 50 % des actions d’une société étrangère si l’attribution à la baisse était prise en compte. Cependant, cette correction technique n’a pas encore été adoptée.

Crédits pour impôt étranger L’IRS a publié un règlement définitif et un projet de règlement portant sur les crédits pour impôt étranger, qui ont réglé une kyrielle de questions concernant ces crédits. Y sont énoncées des lignes directrices sur la coordination des dispositions sur les crédits pour impôt étranger et des dispositions en application de la loi TCJA, comme celles qui concernent le revenu GILTI, le revenu FDII, les règles sur les dispositifs hybrides et les règles d’attribution des frais de recherche-développement, des intérêts sur les prêts consentis à des entités contrôlées et certains autres frais. De plus, ces règlements donnent des éclaircissements détaillés sur la détermination des revenus de succursales étrangères.

3. Autres nouveaux règlements

En plus des règlements relatifs à la loi TCJA, l’IRS a adopté des règlements interprétant d’autres dispositions du Code :

Règles sur l’audit des sociétés de personnes. L’IRS a adopté la version définitive d’un règlement appliquant les nouvelles règles en matière d’audit des sociétés de personnes, qui lui permet de percevoir des impôts, des intérêts et des pénalités auprès d’une société de personnes plutôt que ses associés. Selon ce règlement, une personne des États-Unis doit être nommée comme le représentant de la société de personnes pour pouvoir intervenir à l’égard des audits de l’IRS, et disposera alors de vastes pouvoirs lui permettant de régler les questions fiscales soulevées par les audits. Le règlement définitif ne comporte que des changements mineurs par rapport au projet de règlement d’août 2018.

Caisses de retraite étrangères admissibles. L’IRS a publié un projet de règlement longuement attendu sur la dispense de l’application de la loi Foreign Investment in Real Property Tax Act (la « loi FIRPTA ») accordée aux caisses de retraite étrangères admissibles (qualified foreign pension fund). Cette dispense était prévue par la loi Protecting Americans from Tax Hikes Act de 2015. Le projet de règlement sur les caisses de retraite étrangères admissibles, généralement favorable aux contribuables, comprend des dispositions qui (i) élargissent la définition d’« entités contrôlées » (controlled entities) pour que ces entités soient également admissibles à la dispense accordée aux caisses de retraite étrangères admissibles; (ii) permettent aux caisses de retraite étrangères admissibles de procurer des avantages « accessoires » (ancillary) en plus de prestations de retraite, à condition que la valeur des avantages accessoires représente moins de 15 % de la valeur de l’ensemble des avantages procurés; et (iii) assouplissent l’exigence selon laquelle les caisses de retraite étrangères admissibles doivent avoir droit aux avantages fiscaux dans leur propre pays. Dans le préambule du projet de règlement, l’IRS avise les contribuables qu’il compte réviser le formulaire W-8EXP à l’usage des caisses de retraite étrangères admissibles, mais qu’entre-temps, ils peuvent, pour attester qu’ils sont des caisses de retraite étrangères admissibles, produire l’attestation d’entité non étrangère prévue par la loi FIRPTA.

Passif des sociétés de personnes. L’IRS a publié deux règlements définitifs régissant l’attribution des passifs des sociétés de personnes ayant trait aux ventes déguisées et à d’autres opérations. Les règlements traitent des situations dans lesquelles on fait abstraction de certaines obligations de corriger un solde déficitaire dans le compte capital d’un associé, comme le permet l’article 704, et des situations dans lesquelles le passif d’une société de personnes est traité comme un passif avec droit de recours en application de l’article 752. De plus, ils précisent comment les obligations de paiement liées à une garantie sur les derniers dollars (bottom dollar guarantee) sont traitées selon l’article 752. Les sociétés de personnes trouveront dans ces règlements définitifs les lignes directrices nécessaires à l’attribution de leur passif à leurs associés. Les règlements définitifs comportent des changements par rapport aux projets de règlements, dont l’ajout, aux types d’obligations de paiement pouvant constituer une garantie sur les derniers dollars aux fins du Code, d’obligations en matière d’apport de capital et de correction du solde déficitaire de la société de personnes.

Article 382. Le nouveau projet de règlement de l’IRS relatif à l’article 382 a notamment pour effet de limiter la possibilité pour une société par actions d’utiliser ses pertes d’exploitation nettes après un changement de propriétaire(s) (ownership change, au sens donné à ce terme aux fins de l’article 382). Selon ce projet de règlement, les gains ou les pertes non réalisés, mais existants au moment du changement de propriétaire(s) et constatés après le changement de propriétaire(s) sont traités comme s’ils avaient été constatés avant le changement de propriétaire(s). Selon la législation antérieure, le montant du gain ou de la perte constaté après le changement de propriétaire(s) pouvait être déterminé soit en fonction de la vente hypothétique des actifs de la société, soit de leur vente réelle. Le nouveau projet de règlement exige des contribuables qu’ils déterminent le montant du gain ou de la perte constaté en fonction de la vente réelle des actifs. Il est prévu que cette nouvelle exigence sera défavorable aux contribuables.

Conversions en FPI. En réponse partielle à un décret-loi du président Trump exigeant la révision de règlements antérieurs, l’IRS a publié un nouveau projet de règlement visant à limiter le montant des gains devant être constatés à la conversion d’une société dite C Corporation en un fonds de placement immobilier (un « FPI ») dans les dix années suivant une scission de la C Corporation.

S Corporations. L’IRS a publié un projet de règlement visant à préciser que les revenus d’une société dite S Corporation sont assujettis à l’impôt pour ce qui est des actions que détient indirectement un étranger non résident par l’entremise d’une petite fiducie commerciale ayant fait ce choix à l’égard de ses actions (electing small business trust).

Jurisprudence fiscale

Altera. En 2018, l’IRS a remporté une victoire dans l’affaire Altera v. Commissioner, une affaire de fixation des prix de transfert au sujet de la répartition du coût de la rémunération à base d’actions conformément à des accords de partage des coûts conclus avec des filiales étrangères. Toutefois, la Cour du neuvième circuit a retiré son avis un mois plus tard, en raison du décès de l’un des juges. En 2019, cette cour a réitéré son avis que le règlement devait être respecté, satisfaisant au critère « Chevron » habituellement appliqué aux actions visant des questions de réglementation. Le contribuable visé par cette décision, s’il souhaite porter la décision en appel devant la Cour suprême des États-Unis, doit le faire au plus tard au début de l’année 2020.

Dernières nouvelles concernant les conventions fiscales

Après en avoir été empêché pendant des années par le sénateur Rand Paul, le Sénat a ratifié plusieurs protocoles portant sur des conventions fiscales existantes. Les protocoles ratifiés ont trait à des conventions fiscales conclues avec le Japon, le Luxembourg, l’Espagne et la Suisse. Le sénateur Paul a continué de contester les protocoles au motif qu’ils ne protègent pas suffisamment le droit à la vie privée des contribuables américains vivant à l’étranger. La ratification des conventions fiscales actualisées avec le Chili, la Hongrie et la Pologne est toujours en attente.

Événements récents concernant la législation fiscale des États

L’an dernier, nous avons mentionné l’affaire South Dakota v. Wayfair Inc., la plus importante en matière de fiscalité des États tranchée par la Cour suprême des États-Unis au cours des dernières décennies. Dans l’affaire Wayfair, la Cour suprême a établi une nouvelle norme de connexion virtuelle substantielle (substantial virtual connexion) selon laquelle un lien est créé aux fins des taxes de vente et d’utilisation lorsqu’un détaillant n’ayant aucune présence physique dans un État accède aux résidents de l’État uniquement en ligne, à condition que les critères quant au nombre minimal de clients et au chiffre de ventes minimal au cours de la période imposable soient satisfaits.

Au cours de l’année suivant la décision dans l’affaire Wayfair, presque tous les États qui imposent une taxe de vente ou une taxe d’utilisation ont adopté de nouvelles normes en matière de lien aux fins d’imposition semblables à celles du Dakota du Sud (et, dans certains cas, encore plus rigoureuses). Les normes des États varient toutefois en termes de critères établis, de méthode employée pour vérifier si un contribuable satisfait aux critères et d’application de la norme aux « facilitateurs de marché » (marketplace facilitators) comme Amazon ou eBay. Un État, le New Hampshire, a même adopté une loi « anti-Wayfair » dans le but d’empêcher d’autres États d’imposer ses résidents en vertu d’une loi inspirée par l’affaire Wayfair.

C’est le droit fédéral et non la jurisprudence qui régit l’établissement du lien aux fins d’imposition dans les États. Ainsi, la décision dans l’affaire Wayfair n’autorise pas directement les États à imposer aux vendeurs de l’extérieur de leur État un impôt sur le revenu. Toutefois, certains États travaillent déjà à renforcer leurs règles concernant l’établissement du lien aux fins d’imposition, prévoyant la possibilité que la Cour suprême, si elle est saisie de la question, autorise une norme de connexion virtuelle substantielle pour l’impôt sur le revenu comme elle l’a fait pour les taxes de vente et d’utilisation.

Nouveautés à l’échelle internationale ayant une incidence sur les États-Unis

L’OCDE travaille à son projet de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (base erosion and gain shifting) (le « projet BEPS ») depuis 2012. Même si bon nombre des mesures liées au projet BEPS visent à réduire les types d’évitement fiscal qu’a rendu possibles l’économie numérique, les États-Unis, en général, se sont tenus à l’écart du projet BEPS et ont refusé d’adopter des mesures inspirées par celui-ci comme la norme commune de déclaration ou l’Instrument multilatéral (défini ci-dessous).

En 2019, certains pays, fatigués d’attendre que les efforts de l’OCDE portent fruit, ont pris des mesures unilatérales afin de percevoir des impôts auprès des grandes sociétés du numérique comme Amazon, Google et Uber. En général, ces mesures unilatérales ont pris la forme de taxes sur les services numériques s’appliquant au chiffre d’affaires tiré de la fourniture de certains services numériques dans le pays visé. La France s’est fait beaucoup remarquer par sa taxe sur les services numériques, mais d’autres pays ont proposé des mesures semblables, dont la Hongrie, l’Espagne, la Pologne, l’Inde et la Turquie. Nous examinons la question de l’imposition éventuelle d’une telle taxe au Canada dans la partie de notre article portant sur le Canada2.

Aux États-Unis, en général, ces mesures ont été considérées comme une attaque contre ce pays, ou du moins contre certaines des entreprises américaines les plus grandes et les plus puissantes. L’administration Trump, en fin de compte, a riposté en proposant des tarifs douaniers sur une grande variété d’importations françaises, comme le vin.

L’OCDE a continué de travailler à son projet BEPS tout au long de l’année 2019. Un grand nombre des réformes fiscales transfrontalières proposées dans le cadre du projet BEPS ont été intégrées dans une convention fiscale multilatérale appelée l’Instrument multilatéral (l’« IM »). Au moment de la rédaction du présent article, 93 pays, dont le Canada, avaient signé l’IM. Les États-Unis, toutefois, sont peu enclins à y adhérer, même si certaines modifications récemment apportées à la législation et aux politiques fiscales américaines sont semblables aux dispositions de l’IM et malgré le fait que les États-Unis bénéficieraient d’une adoption plus généralisée des dispositions d’arbitrage de l’IM.

Fiscalité américaine : perspectives pour 2020

L’IRS a passé une grande partie des deux dernières années à élaborer des lignes directrices en application de la loi TCJA; malgré cela, d’importants projets de règlements liés à la loi TCJA sont toujours en cours. Au moment de la rédaction du présent article, l’IRS et le département du Trésor visent la fin de l’année 2020 pour terminer la publication de tous leurs articles d’interprétation de la loi TCJA. Ils auront ainsi publié presque cent documents, y compris les règlements définitifs sur la limitation de la déductibilité des intérêts selon l’article 163(j), la possibilité de traitement comme gains en capital des intérêts reportés et de nombreuses autres dispositions.

En 2020, les nouveautés fiscales les plus controversées découleront probablement de la politique fiscale des candidats à la présidence. Beaucoup de candidats démocrates proposent une expansion substantielle de programmes sociaux dispendieux comme l’assurance maladie (Medicare), qui nécessitera de nouvelles sources de financement. Les impôts sur la fortune que proposent Bernie Sanders et Elizabeth Warren à cette fin sont déjà à la une de l’actualité. D’autres mesures fiscales pourraient servir à générer des recettes, par exemple :

  • la hausse du taux d’imposition des intérêts reportés
  • l’adoption d’une taxe sur la valeur ajoutée ou d’un impôt sur la fortune
  • la hausse du taux d’imposition des sociétés
  • la réduction des déductions pour les revenus GILTI
  • la baisse de l’exemption s’appliquant aux impôts sur les dons et aux droits successoraux.

D’autres mesures potentielles pourraient être prises qui ne seraient pas des mesures servant à générer des recettes, mais plutôt des mesures à objectif politique, comme l’élimination du plafond de la déduction pour impôts locaux et d’État, qui est très impopulaire, l’accroissement de la participation des États-Unis aux initiatives de l’OCDE telles que le projet BEPS ou l’IM, ou le refus d’adopter les corrections techniques envisagées à la loi TCJA.

1 Sauf indication contraire, les renvois sont des renvois au Internal Revenue Code de 1986, dans sa version modifiée (le « Code ») ou aux règlements qu’a pris en vertu de cette loi le département du Trésor.

2 Nous examinons la question de l’imposition éventuelle d’une telle taxe au Canada dans la partie de notre article portant sur le Canada.

Personne-ressource

Connexe

Le Canada adopte enfin la TSN (peut-être)

9 juil. 2024 - La nouvelle Loi de la taxe sur les services numériques, qui est entrée en vigueur par décret le 28 juin 2024, impose une taxe sur les services numériques (la « TSN ») de 3 % sur certains revenus que tirent de grandes entreprises de services numériques de source canadienne. La TSN sera...