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Composer avec la nouvelle norme : Entrée en vigueur de nouvelles modifications à la Loi sur la concurrence du Canada

Auteurs : Anita Banicevic, John Bodrug et Umang Khandelwal

Le Parlement a récemment adopté le projet de loi C-59 (Loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2023), qui apporte à la Loi sur la concurrence du Canada d’importantes modifications, dont bon nombre sont maintenant en vigueur. Ces modifications font suite aux changements déjà importants apportés à la Loi sur la concurrence en juin 2022 et en décembre 2023, et sont l’aboutissement d’un débat public qui aura duré trois ans dans un contexte où l’intérêt du politique pour la réforme du droit de la concurrence est allé croissant. Comme nous l’expliquons plus en détail ci-après, les modifications en question annoncent vraisemblablement, en ce qui concerne la mise en application du droit de la concurrence, une période d’activité accrue.

Depuis son dépôt initial, le projet de loi a subi d’importantes modifications. En effet, les membres du Parlement y ont intégré la plupart des recommandations que le commissaire de la concurrence (le « commissaire ») avait formulées dans le mémoire qu’il a présenté au Sénat à ce sujet. Le projet de loi C-59, tel qu’il a été adopté, modifie la Loi sur la concurrence de la façon suivante :

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Fusionnements : nouveaux critères pour les transactions devant faire l’objet d’un avis

Par suite des modifications, le seuil relatif à la « taille de la transaction » applicable aux avis de fusionnement obligatoires inclut désormais les ventes d’une société cible « au Canada » générées par des actifs étrangers, en plus des ventes « au Canada ou en provenance du Canada » générées par des actifs canadiens. Cette modification est conforme aux seuils applicables aux avis de fusionnement en vigueur dans de nombreux territoires étrangers, qui sont souvent fondés sur le « chiffre d’affaires », c’est-à-dire les ventes, en fonction de l’emplacement du client. Cela dit, le seuil canadien exigera toujours que les ventes à l’exportation réalisées par une société cible « en provenance » du Canada soient incluses dans le calcul, et le seuil canadien peut toujours être satisfait de manière indépendante en fonction de la valeur des actifs de la société cible au Canada.

Si le critère relatif à la « taille de la transaction » (ainsi que le critère supplémentaire existant relatif à la « taille des parties ») peut désormais être rempli en fonction uniquement des ventes au Canada, il convient de noter que les dispositions relatives aux avis de fusionnement ne s’appliquent toujours que lorsque la transaction comporte l’acquisition d’une « entreprise en exploitation ». Une entreprise en exploitation s’entend d’une « entreprise au Canada à laquelle des employés affectés à son exploitation se rendent ordinairement pour les fins de leur travail ». Cela peut vouloir dire que, pour que les obligations relatives aux avis de fusionnement s’appliquent, la société cible doit encore exercer des activités au Canada, pas simplement réaliser des ventes au Canada à partir d’activités étrangères.

Fusionnements : délais de prescription et étendue de l’examen

Le projet de loi C-59 prolonge le délai de prescription pour contester des fusionnements n’ayant pas fait l’objet d’un avis à trois ans après la clôture. Toutefois, le délai de prescription existant de un an est maintenu pour les transactions ayant fait l’objet d’un avis, y compris les transactions d’une taille inférieure aux seuils applicables aux avis pour lesquelles les parties demandent volontairement l’autorisation du Bureau de la concurrence.

En outre, le projet de loi C-59 autorise explicitement le Tribunal à ordonner une mesure de redressement lorsqu’il conclut qu’un fusionnement diminue sensiblement ou empêche la concurrence sur les marchés du travail. Il reste à voir si, dans la pratique, un tel changement aura un effet sur l’examen des fusionnements, étant donné que le Tribunal n’avait auparavant aucune restriction quant à l’examen des effets d’un fusionnement sur les marchés du travail. Toutefois, les parties à un fusionnement pourraient devoir composer avec le fait que, dans le cadre de son examen, le Bureau portera une plus grande attention aux effets du fusionnement sur les marchés du travail.

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Fusionnements : importance accrue des facteurs structurels, tels que la part du marché, dans l’examen des fusionnements

Avant le projet de loi C-59, le droit canadien de la concurrence interdisait au Tribunal de conclure qu’il y avait empêchement ou diminution sensible de la concurrence en raison seulement de la concentration ou de la part du marché. Le projet de loi C-59 abroge cette disposition de la Loi sur la concurrence, même si le Tribunal a constaté à plusieurs reprises que ces deux facteurs permettaient néanmoins d’évaluer si un fusionnement, réalisé ou proposé, aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement ou d’empêcher la concurrence.

Conformément aux recommandations du commissaire, le projet de loi, tel qu’amendé en commission, introduit des présomptions structurelles réfutables à l’égard des fusionnements, lesquelles cadrent largement avec les seuils non contraignants énoncés dans la version actualisée des lignes directrices sur les fusionnements publiée par les autorités antitrust américaines en 2023. Plus précisément, il y aura présomption d’illégalité si le fusionnement (i) vise des entreprises détenant une part du marché supérieure à 30 % ou (ii) donne lieu après la clôture à un « indice de concentration » (déterminé en élevant au carré les parts du marché des participants au marché pertinent) de plus de 1 800, et entraîne une augmentation de l’indice de plus de 100 par rapport aux niveaux existants avant le fusionnement.

Il reste à voir quelle sera l’importance de ces modifications dans la pratique. Alors que l’autorisation d’un fusionnement qui augmenterait sensiblement la concentration du marché sera soumise à certaines présomptions réfutables, les tribunaux américains ont estimé que la quantité de preuves que les défendeurs doivent produire pour surmonter une telle présomption est relativement faible, surtout si le demandeur s’appuie uniquement sur une présomption structurelle.

Les nouvelles présomptions relatives au seuil de concentration ne s’appliqueraient pas aux transactions qui ont déjà été conclues ou ont déjà fait l’objet d’un avis au commissaire avant le 20 juin 2024, date d’entrée en vigueur du projet de loi C-59.

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Fusionnements : nouvelle norme de redressement

Lorsque le Tribunal conclut qu’un fusionnement aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement ou d’empêcher la concurrence, la Loi prévoit désormais que le Tribunal peut rendre une ordonnance « afin de préserver le niveau de concurrence » qui existerait « sans le fusionnement ». Dans leurs décisions, les tribunaux avaient précédemment établi qu’une ordonnance rendue en application des dispositions relatives aux fusionnements avait pour but de rétablir la concurrence de sorte qu’il ne soit plus possible de dire qu’elle est sensiblement inférieure à ce qu’elle était avant le fusionnement.

Le commissaire préconise depuis longtemps cette modification afin de diminuer le fardeau que représente l’obtention de vastes mesures de redressement ou le blocage complet d’un fusionnement dont il est établi qu’il empêche ou diminue sensiblement la concurrence. Toutefois, il reste à voir comment le Tribunal abordera son évaluation du « niveau de concurrence » dans ce contexte, et le Tribunal conserve un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne la délivrance d’ordonnances, même lorsqu’il est établi qu’un fusionnement aura pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence.

Par suite de cette modification et de la différence qui en résulte entre la norme permettant de bloquer un fusionnement (ou un aspect de celui-ci) et la mesure de redressement requise, les parties pourraient être amenées à restructurer leur transaction puis à déposer un nouvel avis, ou encore à proposer des mesures de redressement dès le départ.

Fusionnements : ordonnances provisoires

Lorsque le commissaire décide de contester un fusionnement proposé ou qu’il a besoin de plus de temps pour mener à bien son examen, et que la conclusion de la transaction pourrait entraîner une situation difficile à renverser (et donc avoir une incidence sur la capacité du Tribunal à ordonner une mesure de redressement adéquate), le commissaire peut faire une demande d’ordonnance provisoire empêchant les parties de conclure leur transaction, en attendant l’achèvement de l’examen ou l’issue de la contestation. Le processus d’obtention d’une telle ordonnance prend un certain temps, et certaines parties ont cherché à conclure rapidement leur transaction avant que le Tribunal ne se prononce sur la demande d’ordonnance. En vertu des dispositions du projet de loi C-59, il est désormais interdit de réaliser le fusionnement jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur la demande d’ordonnance provisoire. En raison d’une telle modification, les parties à un fusionnement pourraient avoir plus de difficulté à conclure leur transaction dès lors que le commissaire s’y oppose.

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Initiatives environnementales : de nouvelles restrictions sur les prétentions « écologiques »

Le projet de loi C-59 crée une nouvelle disposition interdisant à quiconque de donner au public, sous la forme d’une déclaration ou d’une garantie « visant les avantages d’un produit pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux, sociaux et écologiques des changements climatiques », des indications qui ne se fondent pas sur une épreuve suffisante et appropriée.

Le commissaire avait déclaré que de nombreuses plaintes pour « écoblanchiment » que le Bureau de la concurrence avait reçues ne concernaient pas des allégations sur des produits particuliers, mais plutôt sur une entreprise ou une marque dans son ensemble, comme les allégations sur le fait d’être « carboneutre ». C’est pourquoi le projet de loi C-59 a ajouté une autre disposition à la Loi sur la concurrence, qui interdit à quiconque à donner au public des indications sur les « avantages d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques » si les indications ne se fondent pas sur des « éléments corroboratifs suffisants et appropriés obtenus au moyen d’une méthode reconnue à l’échelle internationale ». La portée éventuelle de ces dispositions a suscité de nombreux commentaires et inquiétudes parmi les parties prenantes du monde des affaires.

Entre autres préoccupations, le concept de « méthode reconnue à l’échelle internationale » n’est défini nulle part dans la législation. En outre, dans son mémoire au Sénat, le commissaire n’a aucunement proposé un tel concept. Étant donné la possibilité que divers pays aient adopté des méthodes contradictoires et vu l’absence de normes ou de méthodes « internationales » dans certains cas, les entreprises qui cherchent à faire connaître leurs initiatives environnementales et à livrer concurrence sur une telle base au Canada pourraient certainement bénéficier de lignes directrices de la part du Bureau ou des tribunaux en temps opportun. À cette fin, la commission sénatoriale qui a étudié le projet de loi a souligné l’importance que le Bureau tienne des consultations significatives et la nécessité qu’il établisse des lignes directrices claires dans ce domaine. En outre, bien que la commission sénatoriale ait noté que de telles allégations devaient être fondées sur des éléments corroboratifs obtenus au moyen d’une méthode reconnue à l’échelle internationale, elle a laissé entendre que de tels éléments devraient également être obtenus au moyen des pratiques exemplaires en vigueur au Canada, telles que celles établies par Environnement et Changement climatique Canada. Quoi qu’il en soit, étant donné la référence à des « éléments corroboratifs suffisants et appropriés », nous nous attendons à ce que cette disposition soit en fin de compte interprétée sur la base de la jurisprudence traitant des indications de rendement découlant de la Loi sur la concurrence.

Initiatives environnementales : nouveaux certificats d’autorisation pour les collaborations environnementales

Le projet de loi C-59 crée également un nouveau mécanisme permettant au commissaire de délivrer un certificat attestant qu’il est convaincu qu’un accord proposé (i) a pour but de protéger l’environnement et (ii) n’aura vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence dans un marché. Lorsqu’un tel certificat est délivré, les dispositions relatives aux complots criminels (article 45 et dispositions connexes) ne s’appliquent pas à l’accord. Un certificat d’autorisation immuniserait également l’accord proposé contre les dispositions civiles relatives aux accords anticoncurrentiels prévues à l’article 90.1 de la Loi sur la concurrence.

Les certificats d’autorisation seraient valides 10 ans (sous réserve de prorogation à la demande des parties). Toutefois, il ne semble pas possible de demander de certificats pour les accords existants, pas plus qu’il ne semble possible d’user de ce mécanisme à l’égard des accords qui empêchent ou diminuent sensiblement la concurrence, mais qui présentent d’importants avantages environnementaux qui, selon le point de vue, pourraient compenser les effets anticoncurrentiels. Il reste à voir si les parties estimeront qu’il vaut la peine de demander un tel certificat compte tenu du temps et de l’argent qu’il faut y consacrer, et compte tenu des limites de la disposition et de l’obligation de fournir tout renseignement que le commissaire peut demander une fois la demande de certificat soumise. En outre, dans les recommandations qu’il a formulées au Sénat et qui sont mentionnées ci-dessus, le commissaire a soutenu que les dispositions relatives aux certificats étaient inutiles et peu susceptibles d’éliminer les obstacles aux collaborations commerciales. Le commissaire a également exprimé des inquiétudes quant à la mince possibilité que d’aucuns perçoivent de modifier ou de révoquer ultérieurement un certificat une fois que les circonstances ont changé. Les commentaires du commissaire peuvent indiquer que, de manière générale, il est réticent à délivrer des certificats pour rien d’autre que des accords qui sont par ailleurs si clairement conformes à la Loi sur la concurrence que les parties seraient probablement prêtes à aller de l’avant sans certificat de toute manière.

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Élargissement des droits d’action privés pour les comportements civils susceptibles d’examen

Les modifications apportées en 2022 à la Loi sur la concurrence ont étendu les droits d’action privés aux dispositions relatives à l’abus de position dominante, mais n’ont pas modifié la norme permettant aux parties privées d’obtenir l’autorisation d’intenter une action en vertu de telles dispositions devant le Tribunal et n’ont pas permis aux parties privées d’obtenir des paiements en espèces dans les cas où elles avaient gain de cause. Le projet de loi C-59 prévoit des dispositions supplémentaires qui, à compter du 20 juin 2025, conféreront aux parties privées des droits d’action beaucoup plus vastes qui les inciteront d’autant à présenter des demandes devant le Tribunal.

Élargissement des possibilités pour les parties privées d’obtenir l’autorisation d’intenter une action. À l’heure actuelle, pour obtenir l’autorisation d’intenter une action privée devant le Tribunal, une partie privée est généralement tenue de démontrer qu’elle est directement et sensiblement gênée dans son entreprise en raison du comportement allégué. Les modifications élargissent les critères permettant au Tribunal d’accorder son autorisation lorsque (i) le demandeur est sensiblement gêné dans seulement une partie de son entreprise ou (ii) le Tribunal est convaincu que cela servirait l’intérêt public. Il reste à voir comment le Tribunal interprétera cette orientation législative, et notamment si celle-ci permettra à un plus grand nombre de parties privées, y compris les consommateurs, d’intenter de telles actions devant le Tribunal.

Élargissement des possibilités d’application de la loi par les parties privées. À l’heure actuelle, les parties privées ne peuvent présenter une demande en vertu des dispositions civiles de la Loi sur la concurrence qu’avec la permission du Tribunal et uniquement en ce qui concerne certaines pratiques restrictives du commerce telles que le maintien des prix, le refus de vendre et l’abus de position dominante. Le projet de loi permet également aux parties privées de présenter de telles demandes (avec l’autorisation du Tribunal) en vertu des dispositions civiles de la Loi sur la concurrence relatives à la publicité trompeuse et aux accords anticoncurrentiels.

Renforcement des recours. Le projet de loi C-59 crée également de nouveaux recours pour les parties privées en ce qui concerne les pratiques restrictives du commerce et les dispositions civiles relatives aux accords anticoncurrentiels. Plus précisément, en plus des mêmes recours dont on peut se prévaloir dans le cadre d’une action intentée par le commissaire, à compter de juin 2025, le Tribunal pourra ordonner la restitution aux demandeurs privés et à toute autre personne touchée par le comportement du « bénéfice tiré du comportement visé par l’ordonnance », de la manière qu’il estime indiquée. Il reste à voir dans quelle mesure, le cas échéant, la possibilité d’obtenir restitution d’une somme pourra encourager des parties privées à intenter une procédure de type « action collective » devant le Tribunal.

En outre, les accords conclus hors cours par les parties à une action privée devront faire l’objet d’un avis et, par conséquent, il sera possible que le commissaire les conteste. À l’heure actuelle, les parties à une action privée devant le Tribunal peuvent choisir de régler leur différend au moyen d’un consentement enregistré auprès du Tribunal ou d’un accord. Un consentement enregistré a la même valeur et produit les mêmes effets qu’une ordonnance du Tribunal. Le commissaire peut demander au Tribunal de rendre une ordonnance modifiant ou annulant un tel consentement s’il estime que le consentement a ou aurait vraisemblablement des effets anticoncurrentiels.

À compter du 20 juin 2025, le projet de loi C-59 imposera aux parties à une action privée qui comparaissent devant le Tribunal et qui concluent un accord de règlement après que le Tribunal a accordé sa permission l’obligation d’en faire signifier une copie au commissaire. Le commissaire pourra alors demander au Tribunal de modifier ou d’annuler l’accord de règlement dans les cas où le Tribunal conclut que cet accord « a ou aurait vraisemblablement des effets anticoncurrentiels ». Il n’est pas clair quels seront les motifs ou la capacité du commissaire ou du Tribunal d’annuler ou de modifier un tel accord, en particulier en l’absence d’effets anticoncurrentiels considérables. Néanmoins, l’obligation de faire signifier une copie de l’accord au commissaire pourrait inciter les parties à régler leurs différends avant que le Tribunal n’accorde la permission d’intenter l’action. Par ailleurs, afin d’éviter que le commissaire conteste leur accord ultérieurement, les parties à une action privée pourraient chercher à consulter le commissaire avant de mettre le point final à leur accord.

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Renforcement des dispositions civiles relatives aux collaborations

Nouveaux recours. L’article 90.1 de la Loi sur la concurrence prévoit la possibilité de contester les accords entre concurrents qui empêchent ou diminuent sensiblement la concurrence. À compter du 15 décembre 2024, même les accords de non-concurrence visés par cette disposition pourront être contestés si l’un des objets importants de l’accord ou d’une partie de celui ci consiste à empêcher ou à diminuer la concurrence (en plus d’avoir vraisemblablement un effet considérable sur celle-ci). En plus des ordonnances d’interdiction et des autres recours actuellement disponibles sur consentement en cas de comportement contraire à l’article 90.1, le projet de loi C-59 donne maintenant au Tribunal le pouvoir de faire ce qui suit :

  • imposer des sanctions pécuniaires qui ne peuvent dépasser le plus élevé des montants suivants : (i) 10 millions de dollars pour la première ordonnance (et 15 millions de dollars pour toute ordonnance subséquente) ou (ii) trois fois la valeur du bénéfice tiré de l’accord (ou, si ce montant ne peut pas être déterminé raisonnablement, 3 % des recettes globales brutes annuelles de l’entreprise);
  • enjoindre aux défendeurs à prendre des mesures nécessaires dans le but d’enrayer les effets de l’accord contesté, notamment se départir d’éléments d’actif ou d’actions;
  • dans le cadre d’une action privée, à compter du 20 juin 2025, ordonner la restitution d’une somme ne pouvant excéder la valeur du bénéfice tiré de l’accord contesté et devant être répartie entre les demandeurs privés et les autres personnes touchées par l’accord.

Le comportement antérieur peut être contesté. Le projet de loi C-59 permet désormais de contester les accords et de les soumettre à des sanctions et à des mesures de redressement ordonnées en vertu de l’article 90.1 dans les trois ans suivant la date à laquelle l’accord a pris fin.

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Autres modifications

Élargissement des dispositions relatives au refus de vendre

Le projet de loi C-59 élargit et clarifie le champ d’application des dispositions relatives au refus de vendre de la Loi sur la concurrence.

Pour faire valoir un refus de vendre, il faut établir qu’une personne est « sensiblement gênée dans son entreprise » du fait qu’elle est incapable de se procurer un produit de façon suffisante, où que ce soit sur un marché, aux conditions de commerce normales. Le projet de loi C-59 a modifié cette norme de sorte que, désormais, il suffit d’établir que le demandeur est sensiblement gêné dans une partie seulement de son entreprise.

Conformément à la volonté du gouvernement de protéger le « droit à la réparation » de la population canadienne, les dispositions relatives au refus de vendre ont également été modifiées afin de préciser qu’un « produit » pouvant faire l’objet d’un refus de vendre comprend « un moyen de diagnostic ou de réparation ».

Interdiction de représailles

Avant le projet de loi C-59, la Loi sur la concurrence contenait déjà des dispositions protégeant les dénonciateurs et interdisant aux employeurs de se livrer à des représailles à l’encontre d’un employé qui signalait au commissaire un comportement potentiellement criminel. Le projet de loi C-59 a ajouté de nouvelles dispositions qui viennent interdire les « représailles » destinées à punir, discipliner, harceler ou désavantager une personne en raison de ses communications ou de sa coopération avec le commissaire, y compris relativement à des comportements qui ne sont pas criminels. Le commissaire ou toute personne qui allègue avoir été directement et sensiblement touchée par des représailles peut demander au Tribunal de rendre une ordonnance qui, à la fois, interdit à la personne visée par la demande de continuer de se livrer à une telle activité et prévoit des sanctions pécuniaires.

Dispositions relatives au prix habituel

Les dispositions relatives au prix habituel de la Loi sur la concurrence interdisent à un fournisseur de donner au public, concernant le prix habituel d’un produit, des indications fausses ou trompeuses à un égard important, à moins que le fournisseur ou l’ensemble des fournisseurs n’aient vendu une quantité importante du produit ou offert le produit à ce prix ou à un prix plus élevé pendant une période raisonnable. Le projet de loi C-59 transfère désormais du commissaire aux vendeurs le fardeau d’établir que, concernant le prix habituel d’un produit, leurs indications satisfont aux critères de la Loi sur la concurrence en ce qui concerne les quantités vendues ou la période pendant laquelle le produit a été offert au prix habituel ou à un prix plus élevé.

Dispositions relatives à l’indication de prix partiel

Les modifications apportées en juin 2022 à la Loi sur la concurrence ont explicitement interdit la pratique de l’indication de prix partiel (tant aux termes des dispositions civiles que criminelles), c’est-à-dire « l’indication d’un prix qui n’est pas atteignable en raison de frais obligatoires fixes » imposés par un vendeur.

Le projet de loi C-59 vient préciser que l’indication d’un prix qui n’est pas atteignable en raison de frais obligatoires fixes qui s’y ajoutent constitue une indication fausse ou trompeuse, sauf si les frais obligatoires ne représentent que le montant imposé sous le régime d’une loi fédérale ou provinciale à l’acquéreur du produit.

Conséquences

À l’exception des dispositions du projet de loi qui viennent élargir les droits d’action privés, y compris les paiements de restitution, qui entreront en vigueur le 20 juin 2025, les modifications présentées ci-dessus sont maintenant en vigueur.

Le Bureau de la concurrence a déclaré qu’il « collaborera avec les intervenants pour mettre en œuvre les modifications de la manière la plus ouverte et la plus efficace possible » et prévoit de publier des lignes directrices sur son approche et son interprétation de bon nombre des nouvelles dispositions. Comme il l’a indiqué dans son dernier plan annuel, le Bureau de la concurrence entend renforcer l’application proactive de la loi et tirer parti des récentes modifications apportées à la Loi sur la concurrence pour mieux protéger la population canadienne contre les activités anticoncurrentielles. Les entreprises canadiennes seraient bien avisées de tenir compte de cette approche proactive en matière d’application de la loi lorsqu’elles se livrent à la planification de leurs activités.

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Personnes-ressources

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