L’année 2017 a été marquée par une croissance phénoménale de la chaîne de blocs. Cette technologie, qui sous-tend l’utilisation du bitcoin, a continué d’attirer l’attention des grands médias, des institutions financières, des fonds d’investissement et des organismes de réglementation des valeurs mobilières partout dans le monde. L’essor de la technologie de la chaîne de blocs a été stimulé par l’intérêt que suscitent les ventes de jetons basés sur la chaîne de blocs, communément appelées premières émissions de jetons (l’ « ICO », pour initial coin offerings), qui ont permis de réunir près de 4 milliards de dollars américains en 2017 seulement.
Nous avons précédemment analysé certaines des principales questions juridiques associées à la chaîne de blocs en 2017, dont les positions adoptées par les organismes canadiens et américain de réglementation sur l’application de la législation en valeurs mobilières aux entreprises de ce secteur. Depuis, la Securities and Exchange Commission (la « SEC ») des États-Unis a été active dans la réglementation du secteur. À la fin de l’année dernière, elle a rendu une ordonnance de cessation et d’abstention contre Munchee Inc., qui exploite une application mobile de critique de restaurants, à l’égard de son récent ICO. Plus tôt cette année, le président de la SEC, Jay Clayton, ainsi que le président de la Commodity Futures Trading Commission, Christopher Giancarlo, ont témoigné devant le Sénat américain sur la réglementation proposée des monnaies virtuelles aux États-Unis. Selon des informations récentes, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (la « CVMO ») et la SEC ont également lancé une vaste enquête sur de nombreux ICO effectués récemment. Ainsi, la CVMO aurait envoyé plusieurs demandes de renseignements et la SEC aurait émis des dizaines d’assignations à comparaître à ceux qui facilitent de tels placements.
Dans ce contexte et compte tenu de l’attention accrue accordée aux activités basées sur la chaîne de blocs, nous présentons ci-après les principaux facteurs que les personnes actives dans cette sphère ou désirant le devenir doivent prendre en considération.
Le dilemme du ICO — Le jeton est-il une valeur mobilière?
- Les « jetons valeurs mobilières » par rapport aux « jetons utilitaires. » Le rapport de la SEC sur la « DAO » (Decentralized Autonomous Organization — organisation décentralisée autonome) a été largement interprété par les membres du milieu juridique de la chaîne de blocs comme une indication que la SEC se préoccupait des « jetons valeurs mobilières » (qui comportent une expectative de profit) plutôt que des « jetons utilitaires » (qui comportent une expectative d’utilisation). Signe d’une volonté de prendre ses distances par rapport à cette distinction élaborée par l’industrie, le président Clayton de la SEC a souligné dans son témoignage devant le Sénat américain que, [TRADUCTION] « de façon générale, les structures des ICO que j’ai vues comportent l’offre et la vente de valeurs mobilières » et que [TRADUCTION] « le simple fait de qualifier un jeton un jeton d’ « utilitaire » ou de le structurer de manière à ce qu’il ait une certaine utilité n’empêche pas celui-ci d’être une valeur mobilière. » La question de savoir si un jeton est une valeur mobilière ne sera pas examinée indépendamment de la question de savoir s’il a une certaine utilité, mais la réponse dépendra en définitive des faits et des circonstances pertinents.
- L’évolution d’un jeton. Les organismes de réglementation des valeurs mobilières ont reconnu qu’il était possible qu’un « jeton valeur mobilière » modifie ses caractéristiques au point de ne plus être considéré comme une valeur mobilière. Les organismes de réglementation canadiens n’ont pas encore formulé de lignes directrices sur les cas où un jeton ne sera plus considéré comme une valeur mobilière, mais l’utilité pratique du jeton et la dépendance à l’égard des efforts d’autrui pour la réalisation d’un profit constitueront des facteurs clés pour la réponse à cette question.
- La mobilisation de capitaux peut vicier le placement. Outre la mobilisation de capitaux, un ICO peut être lancé à plusieurs fins légitimes. Par exemple, certaines entités de chaînes de blocs recourent à un ICO pour distribuer des jetons aux parties intéressées à utiliser la plateforme, ce qui contribue concrètement à créer une base d’utilisateurs et à lancer le réseau. Les émetteurs qui ne souhaitent pas être assujettis aux restrictions imposées par la législation en valeurs mobilières doivent choisir leur approche avec soin et s’attendre à ce que les organismes de réglementation examinent avec attention tout ICO servant à amasser des capitaux pour l’entreprise d’un émetteur.
- Le largage et l’émission de jetons gratuits. Récemment, le « largage » de jetons, ou la distribution de jetons gratuits, a gagné en popularité. L’émetteur qui désire éviter toute forme de mobilisation de capitaux susceptible d’entraîner un examen des autorités en valeurs mobilières, mais qui veut néanmoins diffuser ses jetons, peut opter pour un largage plutôt qu’un ICO. En principe, il est possible de limiter le largage aux personnes qui ont fourni la preuve de leur intention d’utiliser la plateforme, ce qui garantit que seuls les utilisateurs actifs recevront des jetons. Les organismes de réglementation canadiens ne se sont pas encore penchés sur le largage, mais il semble possible de soutenir qu’aucun « investissement de fonds » ne se produit dans le cas d’un largage et que le premier volet du test relatif aux contrats d’investissement établi dans SEC c. W.J. Howey Co. n’est pas rempli pour cette raison.
- Éviter de créer une « expectative de profit. » Si l’émetteur de jetons crée chez les investisseurs une attente de plus-value ou leur promet des dividendes ou d’autres flux de revenus, les jetons seront probablement considérés comme des valeurs mobilières. Même lorsque les jetons émis ont une certaine utilité, une expectative secondaire de profit peut transformer un jeton en valeur mobilière. Par exemple, dans l’ordonnance contre Munchee susmentionnée, la SEC a déclaré que [TRADUCTION] « même si les jetons MUN avaient une utilisation pratique au moment du placement, cela ne les empêcherait pas d’être des valeurs mobilières. »
- Activités de commercialisation. Lorsqu’ils commercialisent un ICO, au moyen de documents officiels comme un livre blanc ou de canaux informels comme des blogues, des baladodiffusions ou des vidéos sur YouTube, les émetteurs devraient éviter toute mention de profits que l’acquisition d’un jeton pourrait permettre de réaliser, car cela serait vraisemblablement considéré comme suscitant une expectative de profit futur chez les investisseurs.
- Inscription à la cote d’une bourse et opérations sur le marché secondaire. Toute mesure prise par l’équipe de développement de l’émetteur de jetons pour faire inscrire les jetons à la cote d’une bourse ou pour en faciliter autrement la négociation sur le marché secondaire pourrait être considérée comme créant une expectative de profit. Toutefois, s’il s’agit d’une plateforme vraiment décentralisée, il existe peu de moyens d’empêcher d’autres membres d’un écosystème de jetons d’obtenir une inscription à la cote d’une bourse indépendamment de l’équipe de développement. De plus, certaines bourses décentralisées permettent la négociation de jetons « ERC20 » basés sur Ethereum, même si l’émetteur de jetons n’a nullement consenti ou participé à l’inscription à la cote.
- Cibler de plus grands marchés. Les émetteurs devraient limiter les activités de commercialisation et de vente aux utilisateurs actuels ou éventuels des jetons. Lorsque l’entreprise de l’émetteur vise un créneau ou un marché géographique précis, l’ICO ne devrait pas cibler les acquéreurs de cryptomonnaies ou les investisseurs à l’étranger qui ne peuvent pas utiliser les jetons à leurs fins prévues. La SEC a reproché à Munchee, dont l’application de critiques de restaurants n’est disponible qu’aux États-Unis, d’avoir ciblé des investisseurs crypto en faisant de la publicité sur des babillards électroniques consacrés aux cryptomonnaies et d’avoir traduit les documents de placement en plusieurs langues, car cela indiquait que les jetons étaient vendus pour la réalisation d’un profit plutôt que pour leur utilisation.
- Limiter l’investissement spéculatif. Les émetteurs devraient prendre des mesures concrètes pour limiter la participation à un ICO basée uniquement sur la spéculation. L’imposition d’un plafond d’investissement d’un faible montant conjuguée à l’absence d’un plancher d’investissement pourrait contribuer à une plus large diffusion des jetons et dissuader la spéculation en raison de la plus-value limitée qu’on peut tirer d’un investissement peu élevé. Certains des éléments des jetons de consommation (c’est-à-dire, les jetons qui sont épuisés ou remis après utilisation ou après une certaine période) contribuent également à réduire la spéculation. Par exemple, certaines plateformes ont adopté une politique d’invalidation des jetons inutilisés, selon laquelle les jetons qui n’ont pas été utilisés au plus tard à une date donnée sont annulés. Lier la valeur d’un jeton à un actif matériel peut également dissuader l’investissement spéculatif.
- Les « efforts d’autrui » : combien d’efforts suffisent? Le quatrième volet du test établi par la décision Howey, à savoir le fait de compter sur les efforts d’autrui, est rempli lorsque les fondateurs ou la direction ont le contrôle de l’entreprise ou de la plateforme, ce qui peut comprendre le développement d’une application mobile, la création d’un écosystème pour la plateforme ou la négociation de contrats avec des parties commerciales. On ignore cependant si ce volet sera considéré comme rempli dans les cas où l’équipe de direction exerce des fonctions purement administratives, comme la gestion ou la mise à jour d’une application mobile.
- Les jetons en développement. Les jetons émis à l’égard de plateformes qui ne sont pas entièrement au point (et n’ont donc pas d’utilisation immédiate) ne seront pas considérés comme des jetons utilitaires et devraient donc correctement être considérés comme des valeurs mobilières en raison de la dépendance à l’égard des efforts d’autrui. C’est ce qu’a fait valoir le président Clayton de la SEC dans son témoignage devant le Sénat américain, lors duquel il a comparé les jetons émis à l’égard d’une [TRADUCTION] « participation à un club de livre du mois » et ceux émis à l’égard d’un intérêt dans [TRADUCTION] « une maison d’édition à édifier, dont les auteurs, les livres et les réseaux de distribution seront recrutés plus tard. »
- Communication de renseignements fidèles et exacts. Les autorités en valeurs mobilières mettent fin rapidement aux ICO lorsque l’émetteur communique des renseignements faux ou inexacts dans son livre blanc ou d’autres documents de placement, notamment en ce qui concerne les compétences des membres de l’équipe ou les relations avec les conseillers. Ainsi, la SEC a récemment mis un frein à l’ICO d’AriseBank en raison de nombreuses fausses déclarations qui auraient été faites par la société, notamment l’omission de [TRADUCTION] « divulguer les antécédents judiciaires de membres clés de la haute direction ». La SEC examine aussi attentivement les sociétés ouvertes qui ont récemment modifié leur modèle d’affaires pour mettre l’accent sur la chaîne de blocs et les cryptomonnaies, et elle a récemment suspendu trois sociétés pour communication d’information trompeuse à l’égard de leurs activités liées à la chaîne de blocs.
- Limiter les ventes aux investisseurs se trouvant à l’extérieur des États-Unis et du Canada. Certaines entreprises du secteur de la chaîne de blocs ont limité l’émission de jetons aux investisseurs se trouvant à l’extérieur des États-Unis ou du Canada sur la base de la non-application de la législation en valeurs mobilières de ces deux pays aux investisseurs visés. Les émetteurs qui choisissent cette voie devraient s’informer des règles et des politiques propres à chaque pays, notamment quant au risque de « retour » et à d’autres facteurs de rattachement susceptibles d’entraîner l’application de la législation locale aux placements à l’étranger. Le 31 mars 2018, l’Ontario a adopté des règles d’exonération à l’égard des placements de valeurs mobilières (y compris les jetons valeurs mobilières) effectués à l’extérieur du Canada pour les cas où l’émetteur des jetons s’est substantiellement conformé aux obligations d’information de la législation en valeurs mobilières du territoire non canadien où les jetons ont été placés ou ceux où le placement était dispensé de l’application de ces obligations. Toutefois, les jetons émis en vertu de ces règles d’exonération sont assujettis à une [TRADUCTION] « période de négociation restreinte » en vertu de la législation ontarienne en valeurs mobilières, ce qui signifie que le transfert sans restriction de ces jetons à des personnes se trouvant au Canada obligera l’émetteur à être un émetteur assujetti au Canada. Les émetteurs qui veulent invoquer cette dispense pourraient à la place envisager de prendre des mesures pour garantir que les jetons se retrouveront à l’extérieur du Canada.
- Les éléments crypto à collectionner ne sont probablement pas des valeurs mobilières. Dans une déclaration confirmant que les jetons émis dans le cadre d’un ICO ne sont pas nécessairement tous des valeurs mobilières, la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique a déclaré que les jetons sous-jacents aux éléments crypto à collectionner (par exemple, CryptoKitties, jeu basé sur la chaîne de blocs dans lequel les joueurs collectionnent des chats virtuels, comme un Tamagotchi des temps modernes) ne sont pas assujettis à la législation en valeurs mobilières, ce qui est probablement dû au fait qu’aucune expectative de profit n’est suscitée par suite de l’émission de ces éléments crypto à collectionner.
Conventions de jetons futurs (CJF) — Une voie à suivre?
- Les CJF sont généralement des valeurs mobilières. La CJF est un écrit conclu avant le lancement d’une plateforme fondée sur la chaîne de blocs qui procure à son porteur le droit à des jetons pleinement fonctionnels, qui lui sont livrés une fois que la plateforme est terminée. Conçue pour être vendue aux investisseurs qualifiés comme moyen de lever des capitaux, la CJF (qui est plus clairement une valeur mobilière) doit être conforme à la législation en valeurs mobilières applicable. En outre, on y retrouve généralement l’énoncé des droits des porteurs en cas d’insolvabilité ou si l’émetteur ne remplit pas son obligation d’achever une plateforme fonctionnelle. Une fois que la plateforme est lancée et que les jetons acquièrent leur fonction utile, selon les partisans du modèle de CJF, les jetons sous-jacents émis à la conversion d’une CJF ne sont pas des valeurs mobilières et devraient être librement transférables sans être assujettis à la législation en valeurs mobilières.
- Les jetons émis à la conversion d’une CJF peuvent néanmoins être des valeurs mobilières. La réponse à la question de savoir si les jetons sous-jacents émis à la conversion de la CJF sont ou non des valeurs mobilières dépend des faits et des circonstances de chaque cas. Par exemple, si les porteurs de jetons sont tributaires des efforts déployés par l’équipe de direction pour finaliser le développement de la plateforme fondée sur la chaîne de blocs à la suite de la conversion d’une CJF, les organismes de réglementation des valeurs mobilières pourraient considérer que les jetons sous-jacents sont des valeurs mobilières, nonobstant leur utilisation pratique et le fait que la majeure partie du travail nécessaire pour développer la plateforme a été réalisée au moment de l’émission des jetons.
- Offre d’escompte sur des CJF. Se pose un problème courant lorsque des escomptes sont offerts sur des jetons, puisqu’il y a alors reconnaissance que les jetons sont acquis à des fins spéculatives. Le fait d’offrir un escompte sur les CJF, mais pas sur les jetons émis à la conversion de ceux-ci pourrait contribuer à atténuer le problème (l’on reconnaît ainsi que les CJF, qui sont des valeurs mobilières, sont spéculatives, mais que les jetons eux-mêmes ne le sont pas). Subsidiairement, le fait d’offrir un escompte au moment où le jeton est utilisé plutôt qu’au moment où il est placé (c’est-à-dire, dans le cadre du placement de la CJF ou d’un ICO) encouragerait les porteurs à utiliser le jeton à sa fin prévue, et en augmenterait l’utilité.
- Les CJF et les périodes de détention. Dans certains cas, le porteur d’une CJF sera assujetti à une période de blocage, pendant laquelle il lui est interdit de convertir sa CJF. Les périodes de détention servent à empêcher les porteurs importants de liquider les jetons à profit dès que la plateforme est lancée et que les jetons sont librement négociables. Toutefois, les autorités en valeurs mobilières pourraient considérer ces périodes de détention comme une reconnaissance du fait que les jetons émis sont des investissements spéculatifs et, par conséquent, des valeurs mobilières, puisque les périodes de blocage sont souvent imposées pour empêcher la manipulation des cours. Aussi, une période de détention empêche concrètement le porteur d’utiliser le jeton pendant une période donnée, ce qui compromet son statut de jeton utilitaire. Même si cela n’est pas recommandé, les émetteurs de jetons qui désirent assortir les CJF d’une période de détention devraient faire débuter celle-ci à l’émission des CJF plutôt qu’à la date d’émission des jetons, afin d’éviter de reconnaître indirectement que les jetons comportent des caractéristiques propres aux valeurs mobilières.
Processus et moment — Conquérir la logistique
- Introduction en bourse. Les entreprises qui jouissent d’une certaine notoriété pourraient envisager de faire appel public à l’épargne pour lever des fonds et accroître l’intérêt des investisseurs. Des émetteurs du secteur des cryptomonnaies ont réussi s’inscrire en bourse au moyen de prises de contrôle inversées. Une prise de contrôle inversée, qui consiste en l’acquisition d’une société nominale cotée en bourse, peut offrir des avantages par rapport au processus traditionnel de premier appel public à l’épargne (un « PAPE »), comme une exposition moindre à la volatilité temporaire du marché. Les promoteurs devraient envisager la possibilité d’un examen accru des organismes de réglementation et gérer de façon proactive leur processus et leur communication d’information en conséquence.
- Sollicitation des investisseurs en ligne. Bon nombre de placements de jetons sont offerts par le truchement de sites Web et de portails en ligne qui traitent automatiquement les demandes des acheteurs éventuels. En ce qui concerne les jetons valeurs mobilières, le recours à une interface en ligne pourrait provoquer l’application des restrictions prévues par la législation en valeurs mobilières concernant l’exploitation d’un marché et le courtage de valeurs mobilières. Les émetteurs qui conçoivent un site Web ou un portail de vente devront tenir compte de ces règles.
- Atténuer le risque tout en évitant les délais. Les organismes de réglementation canadiens ont indiqué qu’ils sont prêts à dialoguer avec les innovateurs afin de les aider à comprendre la réglementation changeante. La communication avec les organismes de réglementation offre une certitude accrue et peut réduire substantiellement le risque d’exécution. Mais il faut du temps pour mettre les organismes de réglementation à niveau, et le dialogue peut entraîner des retards. En plus d’examiner dès le départ les questions d’ordre réglementaire, les entreprises du secteur de la chaîne de blocs devraient évaluer les délais de façon réaliste de sorte à faciliter l’accès aux marchés.
Fonds d’investissement et bourses
- Les fonds de cryptomonnaies font face à une surveillance plus serrée. Reconnaissant que les fonds constitués uniquement dans le but d’investir dans une ou plusieurs cryptomonnaies présentent un modèle d’affaires inédit, les autorités en valeurs mobilières du Canada ont prescrit des obligations d’information et des conditions d’inscription plus étendues pour ces fonds. Bien que plusieurs fonds canadiens investissant dans les cryptomonnaies aient obtenu une inscription de fonds d’investissement, aucun n’est autorisé à exercer d’autres activités que des opérations sur des cryptomonnaies établies comme le bitcoin et l’ether. Avant d’investir dans des monnaies « alternatives », aussi appelées « altcoins », un fonds doit solliciter l’approbation préalable de l’organisme de réglementation applicable, probablement en partie en raison des préoccupations relatives à la garde et à l’évaluation des valeurs. Les fonds d’investissement qui désirent faire des opérations sur altcoins pourraient être assujettis à d’autres obligations, selon que ces actifs sont considérés ou non comme des valeurs mobilières. Les organismes de réglementation examinent également s’il y a lieu d’exiger des qualifications additionnelles (comme une formation en sciences informatiques) des fonds qui investissent dans des cryptomonnaies.
- Défis relatifs à la garde. En raison de la nature « au porteur » de bon nombre de cryptomonnaies, les détenteurs de cette nouvelle catégorie d’actifs connaissent bien la pondération des besoins opposés de stockage sécuritaire et d’accès facile. La législation en valeurs mobilières impose des normes de garde plus rigoureuses en matière de stockage d’actifs des fonds d’investissement. Les promoteurs de fonds d’investissement crypto devraient prévoir un dialogue avec les organismes de réglementation avant le lancement, particulièrement ceux qui envisagent la détention d’altcoins, dans les cas où il pourrait être difficile de trouver des fournisseurs de services adéquats.
- Évaluation et volatilité. Les éventuels exploitants de fonds devraient songer à établir une méthodologie d’évaluation rigoureuse des actifs de cryptomonnaie qu’ils ont l’intention de détenir. Les organismes de réglementation tiendront vraisemblablement compte de la volatilité et des sources d’évaluation des actifs sous-jacents pour déterminer si le fonds lui-même peut satisfaire à ses obligations d’évaluation et d’information envers les investisseurs.
- Faciliter et filtrer les transferts. La possibilité de transférer ou d’aliéner des jetons, par négociation, dépense ou « liquidation » est très courante parmi les plateformes d’actifs de cryptomonnaie. Des plateformes complexes peuvent mettre les porteurs en contact afin de faciliter les transferts de jetons ou peuvent filtrer les acheteurs éventuels. Pour les jetons valeurs mobilières, la facilitation et le filtrage peuvent entraîner l’application des règles applicables aux bourses de valeurs, aux autres marchés ou aux courtiers en placement. Les parties intéressées à constituer ces plateformes devraient recourir aux services de conseillers juridiques dès le début du processus afin d’adapter la conception du système en fonction des contraintes, d’obtenir les permis requis ou d’entamer un dialogue avec les organismes de réglementation.